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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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Ces mots furent simultanément prononcés par Matahachi <strong>et</strong><br />

Kojirō. Celui-ci foudroyait du regard <strong>le</strong> <strong>sabre</strong> de celui-là, <strong>et</strong> <strong>le</strong><br />

sang qui en dégouttait.<br />

— Qui êtes-vous ? demanda-t-il avec agressivité.<br />

Matahachi garda <strong>le</strong> si<strong>le</strong>nce. Ayant discerné dans la voix<br />

d’Akemi de la frayeur, il s’inquiétait. Mais après un second coup<br />

d’œil il se détendit. L’inconnu était grand <strong>et</strong> bien bâti, mais pas<br />

plus vieux que Matahachi lui-même. D’après sa coiffure <strong>et</strong> sa<br />

mise juvéni<strong>le</strong>s, Matahachi <strong>le</strong> prit pour un novice, <strong>et</strong> son regard<br />

se fit méprisant. Le moine l’avait réel<strong>le</strong>ment effrayé, mais il était<br />

sûr de l’emporter sur ce jeune fat.<br />

« Est-ce possib<strong>le</strong> que ce soit la brute qui tourmentait<br />

Akemi ? se demanda-t-il. Il me paraît aussi vert qu’une courge.<br />

Je ne connais pas encore la situation, mais s’il la persécute je<br />

crois que je n’ai qu’à lui donner une ou deux <strong>le</strong>çons. »<br />

— ... Qui êtes-vous ? redemanda Kojirō, avec une force qui<br />

chassait <strong>le</strong>s ténèbres autour de lui.<br />

— Moi ? répondit Matahachi, taquin. Je ne suis qu’un être<br />

humain.<br />

Et il sourit franchement. Le sang monta au visage de Kojirō.<br />

— Alors, vous n’avez pas de nom, dit-il. A moins que vous<br />

n’ayez honte de votre nom ?<br />

Provoqué mais pas effrayé, Matahachi répliqua :<br />

— Je ne vois pas l’utilité de donner mon nom à un inconnu<br />

qui de toute façon ne l’a sans doute jamais entendu.<br />

— Surveil<strong>le</strong>z votre langue ! aboya Kojirō. Mais rem<strong>et</strong>tons à<br />

plus tard de nous battre. Je vais faire descendre de l’arbre c<strong>et</strong>te<br />

fil<strong>le</strong>, <strong>et</strong> la ramener où il faut. Attendez ici.<br />

— Ne faites pas l’idiot ! Qu’est-ce qui vous donne à croire<br />

que je vais vous la laisser ?<br />

— En quoi est-ce que ça vous regarde ?<br />

— <strong>La</strong> mère de c<strong>et</strong>te jeune fil<strong>le</strong> était ma femme, <strong>et</strong> je ne veux<br />

pas qu’on lui fasse du mal. Si vous touchez un cheveu de sa tête,<br />

je vous réduis en chair à pâté.<br />

— Voilà qui m’intéresse. Vous semb<strong>le</strong>z vous prendre pour<br />

un samouraï ; pourtant, il me faut avouer que voilà bien des<br />

jours que je n’en ai pas vu d’aussi efflanqué. Mais il y a quelque<br />

chose que vous devriez savoir. C<strong>et</strong>te « Perche à sécher » que j’ai<br />

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