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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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— ... Il fera froid sur la montagne, c<strong>et</strong>te nuit. As-tu fini de<br />

recoudre mon manteau ?<br />

— Il me reste encore quelques points à faire sur votre<br />

kimono.<br />

— Je n’ai pas dit kimono, j’ai dit manteau. Je l’ai sorti pour<br />

que tu y travail<strong>le</strong>s éga<strong>le</strong>ment. Et as-tu lavé mes bas ? Mes<br />

cordons de sanda<strong>le</strong>s sont usés. Fais-m’en ach<strong>et</strong>er des neufs.<br />

Ces ordres p<strong>le</strong>uvaient si dru qu’Otsū n’avait pas <strong>le</strong> temps d’y<br />

répondre, moins encore de <strong>le</strong>s exécuter ; mais el<strong>le</strong> était<br />

incapab<strong>le</strong> de se révolter. <strong>La</strong> peur <strong>et</strong> la consternation la faisaient<br />

ramper devant c<strong>et</strong>te vieil<strong>le</strong> sorcière noueuse.<br />

Il n’était pas question de dîner. Au bout de quelques<br />

minutes, Osugi se déclara prête à partir.<br />

— Al<strong>le</strong>z devant, lui dit Otsū en disposant des sanda<strong>le</strong>s<br />

neuves près de la véranda. Je vous rejoins.<br />

— As-tu apporté une lanterne ?<br />

— Non...<br />

— Sotte ! Tu crois donc que je vais tâtonner sans lumière à<br />

flanc de montagne. Va en emprunter une à l’auberge.<br />

— Je suis désolée. Je n’y ai pas pensé.<br />

Otsū eût bien voulu savoir où el<strong>le</strong>s allaient, mais ne <strong>le</strong><br />

demanda pas, sachant que cela susciterait la colère d’Osugi. El<strong>le</strong><br />

alla chercher la lanterne <strong>et</strong> ouvrit la marche en si<strong>le</strong>nce ; el<strong>le</strong>s<br />

gravirent la colline de Sannen. En dépit de tous <strong>le</strong>s<br />

harcè<strong>le</strong>ments dont el<strong>le</strong> était l’obj<strong>et</strong>, el<strong>le</strong> se sentait joyeuse. <strong>La</strong><br />

l<strong>et</strong>tre devait être de Matahachi, ce qui voulait dire que <strong>le</strong><br />

problème qui la tourmentait depuis tant d’années serait ce soirlà<br />

résolu. « Une fois tout cela mis au point, se dit-el<strong>le</strong>, j’irai à la<br />

maison Karasumaru. Il faut que je voie Jōtarō. »<br />

L’ascension n’était pas faci<strong>le</strong>. El<strong>le</strong>s devaient cheminer avec<br />

prudence afin d’éviter <strong>le</strong>s <strong>pierre</strong>s tombées <strong>et</strong> <strong>le</strong>s trous du<br />

sentier. Dans <strong>le</strong> profond si<strong>le</strong>nce de la nuit, la chute d’eau faisait<br />

plus de bruit que durant <strong>le</strong> jour. Au bout d’un moment, Osugi<br />

déclara :<br />

— Je suis sûre que c’est l’endroit consacré au dieu de la<br />

montagne. Ah ! voici l’écriteau : « Cerisier du dieu de la<br />

montagne »... Matahachi ! appela-t-el<strong>le</strong> dans <strong>le</strong>s ténèbres.<br />

Matahachi ! je suis là.<br />

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