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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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On dit qu’il n’est pas besoin d’être jeune pour aimer jouer.<br />

Quand Haiya Shōyū se trouvait pris de boisson, impossib<strong>le</strong> de <strong>le</strong><br />

r<strong>et</strong>enir.<br />

— ... Conduis-moi à <strong>le</strong>ur chambre ! ordonna-t-il à Sumigiku.<br />

Il lui mit la main sur l’épau<strong>le</strong> pour s’aider à se <strong>le</strong>ver. En vain<br />

Kō<strong>et</strong>su l’exhorta-t-il à se calmer.<br />

— Non ! Je vais chercher Yoshino... Porte-drapeaux, en<br />

avant ! Votre général passe à l’action ! Que <strong>le</strong>s courageux me<br />

suivent !<br />

Une caractéristique étrange des ivrognes, c’est que bien<br />

qu’ils semb<strong>le</strong>nt sans cesse en danger de choir, ou pire, ils s’en<br />

tirent <strong>le</strong> plus souvent sains <strong>et</strong> saufs quand ils sont livrés à euxmêmes.<br />

Pourtant, si nul ne veillait à <strong>le</strong>s protéger notre monde<br />

serait bien froid. Avec toutes ses années d’expérience, Shōyū<br />

était capab<strong>le</strong> de tracer une fine ligne de démarcation entre <strong>le</strong> fait<br />

de s’amuser lui-même <strong>et</strong> celui de divertir autrui. Quand on <strong>le</strong><br />

croyait assez gris pour être faci<strong>le</strong> à manier, il s’efforçait d’être<br />

aussi diffici<strong>le</strong> que possib<strong>le</strong>, titubant jusqu’à ce que quelqu’un<br />

vînt à son secours ; alors, <strong>le</strong>s esprits se rencontraient à la<br />

frontière où l’ivrognerie provoque une réaction de sympathie.<br />

— Vous al<strong>le</strong>z tomber ! s’écria Sumigiku en s’élançant pour<br />

l’en empêcher.<br />

— Ne sois pas sotte. Mes jambes ont beau flageo<strong>le</strong>r quelque<br />

peu, j’ai l’esprit ferme ! dit-il avec malice.<br />

— Essayez donc de marcher seul.<br />

El<strong>le</strong> <strong>le</strong> lâcha ; il s’effondra Aussitôt.<br />

— Je dois être un peu fatigué. Il va falloir que quelqu’un me<br />

porte.<br />

En route vers <strong>le</strong> salon du seigneur Kangan, l’air inconscient<br />

<strong>et</strong> pourtant parfaitement conscient de tout, il chancelait,<br />

oscillait, pareil à de la gelée, <strong>et</strong> de mil<strong>le</strong> autres façons maintenait<br />

ses compagnons dans l’embarras d’un bout à l’autre du long<br />

corridor.<br />

L’enjeu était la question de savoir si oui ou non « ces nob<strong>le</strong>s<br />

inso<strong>le</strong>nts <strong>et</strong> niais », comme il <strong>le</strong>s appelait, allaient monopoliser<br />

Yoshino Dayū. Les grands marchands, qui n’étaient rien de plus<br />

que des roturiers riches, n’étaient pas impressionnés par <strong>le</strong>s<br />

courtisans de l’empereur. Certes, ces derniers étaient<br />

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