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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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direction que moi. Si je me fais tuer, tu r<strong>et</strong>ournes chez <strong>le</strong><br />

marchand de saké de Kyoto. Mais pour <strong>le</strong> moment, va jusqu’à<br />

c<strong>et</strong>te p<strong>et</strong>ite colline, <strong>et</strong> surveil<strong>le</strong> la scène de là-haut. Rien ne<br />

t’échappera.<br />

Après avoir essuyé ses larmes, Jōtarō empoigna Musashi<br />

par <strong>le</strong>s manches <strong>et</strong> s’écria :<br />

— Fuyons !<br />

— En voilà des façons de par<strong>le</strong>r pour un samouraï ! Tu veux<br />

être un samouraï, oui ou non ?<br />

— J’ai peur ! Je ne veux pas mourir !<br />

De ses mains tremblantes, il essayait sans cesse de tirer<br />

Musashi par la manche.<br />

— ... Pensez à moi ! suppliait-il. Je vous en prie, allonsnous-en<br />

pendant qu’il est encore temps !<br />

— En parlant comme ça, tu me donnes envie de fuir, à moi<br />

aussi. Tu n’as pas de parents pour s’occuper de toi, tout comme<br />

moi quand j’avais ton âge. Mais...<br />

— Alors, venez. Qu’est-ce que nous attendons ?<br />

— Non !<br />

Musashi se tourna vers lui, <strong>et</strong>, campé sur ses jambes<br />

largement écartées, <strong>le</strong> regarda droit dans <strong>le</strong>s yeux :<br />

— ... Je suis un samouraï. Tu es un fils de samouraï. Nous ne<br />

fuirons pas.<br />

Devant <strong>le</strong> ton sans réplique de Musashi, Jōtarō céda <strong>et</strong><br />

s’assit ; des larmes sa<strong>le</strong>s lui coulaient sur la figure tandis qu’il<br />

frottait avec ses mains ses yeux rougis <strong>et</strong> gonflés.<br />

— ... Ne t’inquiète pas ! dit Musashi. Je n’ai aucune<br />

intention de perdre. Je vais gagner ! Alors, tout ira bien, n’est-ce<br />

pas ?<br />

Ce discours ne réconforta guère Jōtarō. Il n’en croyait pas<br />

un mot. Sachant que <strong>le</strong>s lanciers du Hōzōin étaient plus de dix,<br />

il doutait que Musashi, compte tenu de sa réputation de<br />

faib<strong>le</strong>sse, pût <strong>le</strong>s battre un par un, sans par<strong>le</strong>r de <strong>le</strong>s vaincre<br />

tous à la fois.<br />

Musashi, quant à lui, commençait de perdre patience. Il<br />

aimait bien Jōtarō, il avait pitié de lui, mais ce n’était pas <strong>le</strong><br />

moment de penser aux enfants. Les lanciers se trouvaient là<br />

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