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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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présenter comme <strong>le</strong> type merveil<strong>le</strong>ux qui veut aider tout <strong>le</strong><br />

monde.<br />

Peut-être Kojirō avait-il cru que s’il disait à Musashi<br />

combien l’ennemi était puissant, Musashi se m<strong>et</strong>trait à quatre<br />

pattes pour <strong>le</strong> prier d’être son second. Et l’on peut concevoir que<br />

si Musashi avait eu pour objectif principal de préserver sa<br />

propre existence, c<strong>et</strong>te assistance eût été pour lui la bienvenue.<br />

Mais avant même de rencontrer Kojirō, il avait glané assez de<br />

renseignements pour savoir qu’il risquait d’avoir à affronter une<br />

centaine d’hommes.<br />

Non qu’il eût oublié la <strong>le</strong>çon que Takuan lui avait<br />

enseignée : l’homme véritab<strong>le</strong>ment brave est celui qui aime la<br />

vie, qui la chérit comme un trésor qu’une fois perdu l’on ne peut<br />

jamais r<strong>et</strong>rouver. Musashi savait bien que vivre, c’est plus que<br />

se borner à survivre. Le problème, c’était de savoir comment<br />

imprégner sa vie de signification, comment assurer que sa vie<br />

lancerait jusque dans l’avenir un vif rayon de lumière, même s’il<br />

devenait nécessaire de renoncer à c<strong>et</strong>te vie pour une cause. Si<br />

Musashi parvenait à réaliser cela, la durée de son existence –<br />

vingt ans ou soixante-dix – importait peu. <strong>La</strong> durée d’une vie<br />

n’est qu’un interval<strong>le</strong> insignifiant dans <strong>le</strong> cours infini du temps.<br />

Selon Musashi, il y avait un mode de vie pour <strong>le</strong>s gens<br />

ordinaires, un autre pour <strong>le</strong> guerrier. Il était pour lui d’une<br />

importance capita<strong>le</strong> de vivre en samouraï <strong>et</strong> de mourir en<br />

samouraï. Pas question de rebrousser chemin sur la voie qu’il<br />

avait choisie. Dût-il être haché menu, l’ennemi ne pouvait<br />

effacer <strong>le</strong> fait qu’il eût répondu sans peur <strong>et</strong> honnêtement au<br />

défi.<br />

Il examina <strong>le</strong>s itinéraires possib<strong>le</strong>s. <strong>La</strong> plus courte, ainsi que<br />

la plus large <strong>et</strong> la plus commode, était la route qu’avait prise<br />

Kojirō. Une autre, un peu moins directe, était un chemin<br />

longeant la rivière Takano, affluent de la Kamo, jusqu’à la<br />

grand-route d’Ohara puis, par la villa impéria<strong>le</strong> Shugakuin,<br />

menant à Ichijōji. Le troisième itinéraire allait vers l’est sur une<br />

courte distance, puis vers <strong>le</strong> nord jusqu’aux vallonnements<br />

d’Uryū, <strong>et</strong> enfin pénétrait par un sentier dans <strong>le</strong> village.<br />

Ces trois routes se rencontraient au pin parasol ; la<br />

différence de distance était insignifiante. Pourtant, du point de<br />

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