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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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Isuzu. Là-dessus, rassemblées autour d’el<strong>le</strong>, el<strong>le</strong>s l’escortèrent<br />

hors de la maison. Comme el<strong>le</strong>s ne voyaient pas Jōtarō, el<strong>le</strong>s<br />

l’appelèrent, <strong>le</strong>s mains en porte-voix ; pas de réponse. Otsū, trop<br />

habituée à ses manières pour être inquiète, <strong>le</strong>ur dit :<br />

— Il a dû se lasser d’attendre, <strong>et</strong> prendre <strong>le</strong>s devants.<br />

— Quel p<strong>et</strong>it garçon désagréab<strong>le</strong> ! s’exclama l’une des jeunes<br />

fil<strong>le</strong>s.<br />

Une autre <strong>le</strong>va soudain <strong>le</strong>s yeux sur Otsū en demandant :<br />

— C’est votre fils ?<br />

— Mon fils ? Comment diab<strong>le</strong> avez-vous pu imaginer ça ? Je<br />

n’aurai vingt <strong>et</strong> un ans que l’année prochaine. J’ai donc l’air<br />

assez vieil<strong>le</strong> pour avoir un enfant aussi grand ?<br />

— Non, mais quelqu’un a dit qu’il était à vous.<br />

Au souvenir de sa conversation avec Arakida, Otsū rougit,<br />

puis se consola en songeant que peu importait ce que <strong>le</strong>s gens<br />

disaient, tant que Musashi avait confiance en el<strong>le</strong>.<br />

A c<strong>et</strong> instant, Jōtarō accourut.<br />

— Dites donc, en voilà des manières ! fit-il avec une<br />

expression boudeuse. Vous commencez par me faire attendre<br />

des sièc<strong>le</strong>s, <strong>et</strong> maintenant vous partez sans moi.<br />

— Mais tu n’étais pas à ta place, lui fit remarquer Otsū.<br />

— Vous auriez pu me chercher, non ? J’ai vu un homme, làbas,<br />

sur la grand-route de Toba, qui ressemblait un peu à mon<br />

maître. J’ai couru voir si c’était bien lui.<br />

— Un homme qui ressemblait à Musashi ?<br />

— Oui, mais ce n’était pas lui. Je suis allé jusqu’à c<strong>et</strong>te<br />

rangée d’arbres, <strong>et</strong> j’ai bien regardé l’homme, de dos ; mais ça<br />

ne pouvait pas être Musashi. L’homme en question boitait.<br />

C’était toujours ainsi lorsque Otsū <strong>et</strong> Jōtarō voyageaient. Il<br />

ne se passait pas un jour sans une lueur d’espoir, suivie de<br />

déception. Partout où ils allaient, quelqu’un <strong>le</strong>ur évoquait<br />

Musashi : l’homme qui passait devant la fenêtre, <strong>le</strong> samouraï<br />

sur <strong>le</strong> bateau qui venait de partir, <strong>le</strong> rōnin à cheval, <strong>le</strong> passager<br />

de palanquin à peine entrevu. P<strong>le</strong>ins d’espoir, ils couraient voir,<br />

mais seu<strong>le</strong>ment pour se r<strong>et</strong>rouver l’un en face de l’autre, l’air<br />

découragé. Cela s’était déjà produit des douzaines de fois. C’est<br />

pourquoi Otsū n’était plus aussi bou<strong>le</strong>versée qu’autrefois, bien<br />

que Jōtarō fût déconfit. Pour se conso<strong>le</strong>r par <strong>le</strong> rire, el<strong>le</strong> dit :<br />

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