14.12.2018 Views

La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

pas que tu devrais t’en al<strong>le</strong>r du tout, mais je ne te laisserai<br />

sûrement pas partir sans te donner un bon <strong>et</strong> solide repas !<br />

Takezō fut à nouveau dans l’incapacité de répondre. Il <strong>le</strong>va<br />

<strong>le</strong> bras pour s’essuyer <strong>le</strong>s yeux. Cela faisait longtemps,<br />

longtemps que nul n’avait été aussi bon pour lui. Il en était venu<br />

à considérer tout <strong>le</strong> monde avec suspicion <strong>et</strong> méfiance ; or, il se<br />

rappelait soudain quel eff<strong>et</strong> cela faisait d’être traité en être<br />

humain.<br />

— ... Et maintenant, dépêche-toi d’al<strong>le</strong>r te baigner, lui dit<br />

Osugi d’un ton de grand-mère. C’est trop dangereux de rester<br />

ici : quelqu’un pourrait te voir. Je te porterai un gant de toil<strong>et</strong>te,<br />

<strong>et</strong> pendant que tu te laveras je te sortirai <strong>le</strong> kimono de<br />

Matahachi <strong>et</strong> des sous-vêtements. Va, prends ton temps <strong>et</strong><br />

décrasse-toi bien.<br />

El<strong>le</strong> lui tendit la lanterne, <strong>et</strong> disparut à l’intérieur de la<br />

maison. Presque Aussitôt, sa bru quitta la demeure, traversa <strong>le</strong><br />

jardin en courant, <strong>et</strong> s’enfonça dans la nuit.<br />

De la maison de bains, où se balançait la lanterne, venait un<br />

bruit d’eau.<br />

— Ça va ? cria d’un ton jovial Osugi. Assez chaud ?<br />

— Juste à point ! Je me sens ressuscité ! cria Takezō en<br />

réponse.<br />

— Prends ton temps <strong>et</strong> réchauffe-toi bien. Le riz n’est pas<br />

encore prêt.<br />

— Merci. Si j’avais su que ce serait comme ça, je serais venu<br />

plus tôt.<br />

Il parla encore deux ou trois fois mais <strong>le</strong> bruit de l’eau<br />

couvrait sa voix, <strong>et</strong> Osugi ne répondit pas.<br />

<strong>La</strong> bru ne fut pas longue à reparaître au portail, tout<br />

essoufflée. El<strong>le</strong> était suivie d’une troupe de samouraïs <strong>et</strong> de<br />

patrouil<strong>le</strong>urs. Osugi sortit de la maison, <strong>et</strong> <strong>le</strong>ur parla bas.<br />

— Ah ! vous lui avez fait prendre un bain. Très adroit, dit<br />

l’un des hommes avec admiration. Oui, c’est parfait ! C<strong>et</strong>te fois,<br />

nous <strong>le</strong> tenons, c’est sûr !<br />

S’étant scindés en deux groupes, <strong>le</strong>s hommes rampèrent<br />

prudemment comme autant de crapauds vers <strong>le</strong> feu qui flambait<br />

sous <strong>le</strong> bain. Quelque chose – quelque chose d’indéfinissab<strong>le</strong> –<br />

79

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!