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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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se cacher. Mais c’eût été grossier envers Kō<strong>et</strong>su, <strong>et</strong> fût revenu à<br />

rompre sa promesse à Rin’ya. Toutefois, bien plus décisif était<br />

son désir qu’on ne l’accusât pas de fuir parce qu’il avait peur.<br />

Après son r<strong>et</strong>our à l’Ōgiya, il croyait avoir fait preuve d’une<br />

admirab<strong>le</strong> maîtrise de soi. Or, voici que Yoshino riait de son<br />

immaturité. Cela ne l’eût pas troublé si el<strong>le</strong> avait badiné à la<br />

façon des courtisanes ; mais el<strong>le</strong> semblait tout à fait sérieuse. Il<br />

avait beau dire qu’il n’était pas fâché, ses yeux la transperçaient<br />

comme des pointes de <strong>sabre</strong>s.<br />

— ... Expliquez-vous.<br />

Comme el<strong>le</strong> ne répondait pas tout de suite, il ajouta :<br />

— ... Ou peut-être ne s’agissait-il que d’une plaisanterie.<br />

Les foss<strong>et</strong>tes de la jeune femme, qui avaient disparu depuis<br />

un moment, reparurent.<br />

— Comment pouvez-vous dire une chose pareil<strong>le</strong> ?<br />

El<strong>le</strong> riait en secouant la tête.<br />

— ... Croyez-vous donc que je plaisanterais de quelque chose<br />

d’aussi grave pour un guerrier ?<br />

— Eh bien, que vouliez-vous dire ? Par<strong>le</strong>z !<br />

— Soit. Puisque vous paraissez tel<strong>le</strong>ment désireux de <strong>le</strong><br />

savoir, je vais tâcher de m’expliquer. M’écoutiez-vous quand je<br />

jouais du luth ?<br />

— Quel est <strong>le</strong> rapport ?<br />

— Peut-être est-il sot de ma part de vous <strong>le</strong> demander. Dans<br />

l’état de tension où vous êtes, vos oreil<strong>le</strong>s ne pouvaient guère<br />

accueillir <strong>le</strong>s sons délicats <strong>et</strong> subtils de c<strong>et</strong>te musique.<br />

— Non, c’est faux. J’écoutais.<br />

— Vous êtes-vous demandé comment toutes ces<br />

combinaisons compliquées de sons doux <strong>et</strong> forts, de phrases<br />

faib<strong>le</strong>s <strong>et</strong> puissantes, pouvaient n’être produites que par quatre<br />

cordes ?<br />

— J’écoutais l’histoire. Qu’y avait-il d’autre à entendre ?<br />

— Bien des gens font cela, mais je voudrais établir une<br />

comparaison entre <strong>le</strong> luth <strong>et</strong> un être humain. Plutôt que d’entrer<br />

dans la technique du jeu, perm<strong>et</strong>tez-moi de vous réciter un<br />

poème de Po Chü-i où il décrit <strong>le</strong>s sons du luth. Je suis sûre que<br />

vous <strong>le</strong> connaissez.<br />

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