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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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Il marcha droit devant lui sans regarder ni à droite, ni à<br />

gauche. Il traversa la fou<strong>le</strong>, sans se détourner une seu<strong>le</strong> fois de<br />

sa ligne droite. Reprenant ses esprits, Osugi s’écria :<br />

— Il est en train de s’enfuir ! Ne <strong>le</strong> laissez pas s’échapper !<br />

<strong>La</strong> fou<strong>le</strong> se referma sur Musashi mais au moment où el<strong>le</strong><br />

croyait l’avoir encerclé, el<strong>le</strong> s’aperçut qu’il avait disparu. <strong>La</strong><br />

stupéfaction était à son comb<strong>le</strong>. Les yeux brillèrent de surprise,<br />

puis devinrent des taches ternes sur des visages sans<br />

expression.<br />

Par p<strong>et</strong>its groupes, ils continuèrent jusqu’au coucher du<br />

so<strong>le</strong>il à courir çà <strong>et</strong> là, cherchant frénétiquement sous <strong>le</strong>s<br />

planchers du temp<strong>le</strong> <strong>et</strong> dans <strong>le</strong>s bois <strong>le</strong>ur proie évanouie.<br />

Plus tard encore, tandis que <strong>le</strong>s gens redescendaient <strong>le</strong>s<br />

pentes obscurcies des collines de Sannen <strong>et</strong> de Chawan un<br />

homme jura qu’il avait vu Musashi sauter avec la facilité d’un<br />

chat au somm<strong>et</strong> du mur d’un mètre quatre-vingts de haut, à côté<br />

de la porte de l’ouest, <strong>et</strong> disparaître.<br />

Nul ne crut c<strong>et</strong>te histoire, Osugi <strong>et</strong> l’onc<strong>le</strong> Gon moins que<br />

quiconque.<br />

Le génie des eaux<br />

Dans un hameau situé au nord-ouest de Kyoto, <strong>le</strong>s coups<br />

pesants d’un maill<strong>et</strong> martelant de la pail<strong>le</strong> de riz faisaient<br />

tremb<strong>le</strong>r <strong>le</strong> sol. Des torrents de pluie qui n’étaient pas de saison<br />

s’infiltraient dans <strong>le</strong>s tristes toits de chaume. C’était un genre de<br />

terrain vague, entre la vil<strong>le</strong> <strong>et</strong> la zone des cultures, d’une si<br />

extrême pauvr<strong>et</strong>é qu’au crépuscu<strong>le</strong>, la fumée des feux de cuisine<br />

ne s’é<strong>le</strong>vait que d’une poignée de maisons.<br />

Un chapeau de vannerie, suspendu sous l’auvent d’une<br />

maisonn<strong>et</strong>te, signalait en caractères grossiers qu’il s’agissait<br />

d’une auberge, mais de l’espèce la plus modeste. Les voyageurs<br />

qui descendaient là étaient impécunieux, <strong>et</strong> ne louaient que la<br />

place où coucher par terre. Pour une paillasse ils payaient un<br />

supplément, mais rares étaient ceux qui pouvaient s’offrir un<br />

pareil luxe.<br />

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