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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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Musashi de faire un tour aux î<strong>le</strong>s que l’on voyait au large, <strong>le</strong>s<br />

deux femmes tâchaient de <strong>le</strong> convaincre d’emporter des<br />

bigorneaux, où qu’il allât.<br />

Musashi s’affairait à en<strong>le</strong>ver de son pied <strong>le</strong> pansement<br />

souillé de pus. Ayant souffert intensément de sa b<strong>le</strong>ssure, il<br />

avait peine à croire que la fièvre <strong>et</strong> l’enflure eussent enfin<br />

disparu. Le pied avait repris sa dimension norma<strong>le</strong>, <strong>et</strong> bien que<br />

la peau en fût blême <strong>et</strong> ridée, il n’était presque plus douloureux.<br />

Chassant de la main batelier <strong>et</strong> pêcheuses, il posa sur <strong>le</strong><br />

sab<strong>le</strong> son pied sensib<strong>le</strong>, <strong>et</strong> alla au bord de l’eau <strong>le</strong> laver. Revenu<br />

sur la véranda, il attendit la serveuse qu’il avait envoyée ach<strong>et</strong>er<br />

des guêtres de cuir <strong>et</strong> des sanda<strong>le</strong>s neuves. Au r<strong>et</strong>our de cel<strong>le</strong>-ci,<br />

il <strong>le</strong>s chaussa <strong>et</strong> fit quelques pas prudents. Il boitait encore, mais<br />

rien à comparer avec <strong>le</strong>s jours précédents.<br />

Le vieux qui faisait cuire <strong>le</strong>s bigorneaux <strong>le</strong>va <strong>le</strong>s yeux.<br />

— Le passeur vous appel<strong>le</strong>. Vous n’aviez pas l’intention de<br />

traverser jusqu’à Ominato ?<br />

— Si. Je crois que de là-bas, il y a un bateau régulier pour<br />

Tsu.<br />

— Exact, <strong>et</strong> il y a aussi des bateaux pour Yokkaichi <strong>et</strong><br />

Kuwana.<br />

— Encore combien de jours avant la fin de l’année ?<br />

Le vieux se mit à rire.<br />

— Je vous envie, dit-il. On voit bien que vous n’avez pas à<br />

payer de d<strong>et</strong>tes de fin d’année. Demain, c’est <strong>le</strong> vingt-quatre.<br />

— Seu<strong>le</strong>ment ? Je croyais qu’on était plus tard.<br />

— C’est beau, la jeunesse !<br />

Tandis qu’il se hâtait vers l’embarcadère du bac, Musashi<br />

avait envie de continuer à courir, de plus en plus loin, de plus en<br />

plus vite. Passer de l’état d’invalide à celui d’homme en bonne<br />

santé lui avait remonté <strong>le</strong> moral, mais ce qui <strong>le</strong> rendait bien plus<br />

heureux, c’était l’expérience spirituel<strong>le</strong> qu’il avait eue ce matinlà.<br />

Le bac était déjà p<strong>le</strong>in mais il réussit à s’y faire une place. De<br />

l’autre côté de la baie, à Ominato, il prit un bateau plus grand à<br />

destination d’Owari. Les voi<strong>le</strong>s se gonflèrent, <strong>et</strong> <strong>le</strong> bateau glissa<br />

sur la surface pareil<strong>le</strong> à un miroir de la baie d’Ise. Musashi,<br />

parqué avec <strong>le</strong>s autres passagers, regardait en si<strong>le</strong>nce, de l’autre<br />

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