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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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Selon Sekishūsai, l’Art de la Guerre était à coup sûr un<br />

moyen de gouverner <strong>le</strong> peup<strong>le</strong>, mais il était aussi un moyen de<br />

se maîtriser soi-même. Cela, il l’avait appris du seigneur<br />

Kōizumi qui, il se plaisait à <strong>le</strong> dire, était la divinité protectrice de<br />

la maison Yagyū. Le certificat que <strong>le</strong> seigneur Kōizumi lui avait<br />

donné pour attester sa maîtrise du sty<strong>le</strong> d’escrime Shinkage ne<br />

quittait pas une étagère de la chambre de Sekishūsai, en même<br />

temps qu’un manuel en quatre volumes de techniques<br />

militaires, que lui avait offert Sa Seigneurie. Aux anniversaires<br />

de sa mort, jamais Sekishūsai ne négligeait de placer devant ces<br />

possessions chéries une offrande de nourriture.<br />

Outre des descriptions des techniques du « <strong>sabre</strong> caché » du<br />

sty<strong>le</strong> Shinkage, ce manuel contenait des illustrations, toutes de<br />

la propre main du seigneur Kōizumi. Jusque dans la r<strong>et</strong>raite,<br />

Sekishūsai se plaisait à déployer <strong>le</strong>s rou<strong>le</strong>aux pour <strong>le</strong>s parcourir.<br />

Il éprouvait une surprise constante à redécouvrir l’adresse de<br />

son maître à manier <strong>le</strong> pinceau. Ces illustrations montraient des<br />

hommes qui se battaient <strong>et</strong> faisaient de l’escrime dans toutes <strong>le</strong>s<br />

attitudes imaginab<strong>le</strong>s. En <strong>le</strong>s regardant, Sekishūsai avait<br />

l’impression que ces hommes d’épée allaient descendre des<br />

cieux pour <strong>le</strong> rejoindre dans sa p<strong>et</strong>ite maison montagnarde.<br />

Le seigneur Kōizumi était venu pour la première fois au<br />

château de Koyagyū quand Sekishūsai avait trente-sept ou<br />

trente-huit ans, <strong>et</strong> débordait encore d’ambition militaire. Sa<br />

Seigneurie, accompagnée de ses deux neveux, Hikida Bungorō<br />

<strong>et</strong> Suzuki Ihaku, parcourait <strong>le</strong> pays à la recherche de spécialistes<br />

des arts martiaux ; un jour, il arriva au Hōzōin. C’était à<br />

l’époque où In’ei venait souvent au château de Koyagyū, <strong>et</strong> In’ei<br />

parla du visiteur à Sekishūsai. Ainsi débutèrent <strong>le</strong>urs relations.<br />

Sekishūsai <strong>et</strong> Kōizumi organisèrent des rencontres de trois<br />

jours d’affilée. Au cours du premier assaut, Kōizumi annonça où<br />

il attaquerait, puis fit exactement ce qu’il avait dit.<br />

<strong>La</strong> même chose eut lieu <strong>le</strong> deuxième jour ; Sekishūsai,<br />

b<strong>le</strong>ssé dans son amour-propre, tenta d’imaginer pour <strong>le</strong><br />

troisième jour une approche nouvel<strong>le</strong>.<br />

Devant c<strong>et</strong>te nouvel<strong>le</strong> attitude, Kōizumi se borna à dire :<br />

— Ça ne va pas. Si vous faites ceci, je ferai cela.<br />

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