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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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— J’ai assez de vous, Takuan. Jamais plus je ne vous<br />

demanderai de m’aider. Je trouverai Musashi moi-même. Je <strong>le</strong><br />

ramènerai à Otsū !<br />

— Sais-tu où est l’endroit ?<br />

— Non, mais je <strong>le</strong> trouverai.<br />

— Sois impertinent si ça te chante, mais il ne te sera pas<br />

faci<strong>le</strong> de trouver où habite Yoshino. Veux-tu que je te <strong>le</strong> dise ?<br />

— Ne vous donnez pas c<strong>et</strong>te peine.<br />

— Jōtarō, je ne suis pas l’ennemi d’Otsū ; je n’ai rien non<br />

plus contre Masushi. Loin de là ! Voilà des années que je prie<br />

pour que tous deux puissent réussir <strong>le</strong>ur existence.<br />

— Alors, pourquoi êtes-vous toujours en train de dire des<br />

choses aussi méchantes ?<br />

— Ça te fait donc c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong>-là ? Peut-être as-tu raison. Mais<br />

pour l’instant, tous deux sont des malades. Si on laisse Musashi<br />

tranquil<strong>le</strong>, il guérira mais Otsū a besoin d’aide. En ma qualité de<br />

prêtre, j’ai tenté de l’aider. Nous sommes censés pouvoir guérir<br />

<strong>le</strong>s maladies du cœur, tout comme <strong>le</strong>s médecins guérissent <strong>le</strong>s<br />

maladies du corps. Hélas ! je n’ai été capab<strong>le</strong> de rien faire pour<br />

el<strong>le</strong> ; aussi, je renonce. Si el<strong>le</strong> est incapab<strong>le</strong> de se rendre compte<br />

que son amour n’est point partagé, <strong>le</strong> mieux que je puisse faire<br />

est de lui conseil<strong>le</strong>r de manger comme il faut.<br />

— Ne vous inquiétez pas. Otsū ne va pas demander secours<br />

à un grand charlatan comme vous.<br />

— Si tu ne me crois pas, va à l’Ōgiya, à Yanagimachi, <strong>et</strong> vois<br />

par toi-même ce que Musashi fabrique. Ensuite, reviens dire à<br />

Otsū ce que tu auras vu. El<strong>le</strong> en aura quelque temps <strong>le</strong> cœur<br />

brisé, mais il se peut que ça lui ouvre <strong>le</strong>s yeux.<br />

Jōtarō se boucha <strong>le</strong>s oreil<strong>le</strong>s.<br />

— Taisez-vous, vieil imposteur !<br />

— C’est toi qui m’as couru après, l’as-tu oublié ?<br />

Tandis que Takuan s’éloignait <strong>et</strong> <strong>le</strong> laissait seul, Jōtarō,<br />

debout au milieu de la rue, répétait une très irrespectueuse<br />

rengaine qui servait aux gamins des rues à tourner en dérision<br />

<strong>le</strong>s prêtres mendiants. Mais sitôt que Takuan eut disparu sa voix<br />

s’étrangla, il éclata en sanglots <strong>et</strong> p<strong>le</strong>ura amèrement.<br />

Lorsqu’enfin il se fut ressaisi, il s’essuya <strong>le</strong>s yeux <strong>et</strong>, comme un<br />

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