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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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el<strong>le</strong> avait été remarquée par <strong>le</strong> chef de la famil<strong>le</strong> Arakida qui,<br />

officiel<strong>le</strong>ment chargé du rituel, occupait <strong>le</strong> deuxième rang après<br />

<strong>le</strong> grand-prêtre.<br />

Quand Arakida avait demandé à Otsū de venir au sanctuaire<br />

enseigner aux jeunes fil<strong>le</strong>s, el<strong>le</strong> avait accepté non tant par désir<br />

d’enseigner que parce qu’il l’intéressait d’apprendre la musique<br />

ancienne, sacrée. En outre, la paix de la forêt du sanctuaire<br />

l’avait séduite, ainsi que l’idée de vivre quelque temps avec <strong>le</strong>s<br />

jeunes fil<strong>le</strong>s du sanctuaire, dont la plus jeune avait treize ou<br />

quatorze ans, <strong>et</strong> l’aînée environ vingt.<br />

Jōtarō avait fait obstac<strong>le</strong> à ce proj<strong>et</strong> car il était interdit à une<br />

personne de sexe masculin, eût-el<strong>le</strong> son âge, d’occuper <strong>le</strong> même<br />

dortoir que <strong>le</strong>s jeunes fil<strong>le</strong>s. On était parvenu à l’arrangement<br />

suivant : Jōtarō pouvait ratisser <strong>le</strong>s jardins sacrés dans la<br />

journée, <strong>et</strong> passer la nuit dans <strong>le</strong> bûcher des Arakida.<br />

Tandis qu’Otsū traversait <strong>le</strong>s jardins du sanctuaire, une bise<br />

lugubre sifflait dans <strong>le</strong>s arbres dépouillés. Une mince colonne de<br />

fumée s’é<strong>le</strong>vait d’un bosqu<strong>et</strong> éloigné ; Otsū songea à Jōtarō qui,<br />

là-bas, devait n<strong>et</strong>toyer <strong>le</strong> jardin avec son balai de bambou. El<strong>le</strong><br />

s’arrêta pour sourire, contente que l’incorrigib<strong>le</strong> Jōtarō se<br />

montrât fort sage : il s’appliquait à ses tâches, à l’âge où <strong>le</strong>s<br />

jeunes garçons ne pensent qu’à jouer.<br />

Le vio<strong>le</strong>nt craquement qu’el<strong>le</strong> entendit ressemblait à une<br />

branche d’arbre qui se casse. Cela se produisit une seconde fois ;<br />

agrippée à son fardeau, el<strong>le</strong> courut <strong>le</strong> long du sentier vers <strong>le</strong><br />

bosqu<strong>et</strong> en appelant :<br />

— Jōtarō ! J-ô-ô-t-a-r-ô-ô-ô !<br />

— Ou-i-i-i ? répondit-il à p<strong>le</strong>ins poumons.<br />

Aussitôt, el<strong>le</strong> l’entendit courir. Mais en arrivant devant el<strong>le</strong>,<br />

il dit seu<strong>le</strong>ment :<br />

— ... Ah ! c’est vous.<br />

— Je croyais que tu étais censé travail<strong>le</strong>r, dit Otsū avec<br />

sévérité. Que fais-tu avec ce <strong>sabre</strong> de bois ? Et dans tes<br />

vêtements de travail blancs, par-dessus <strong>le</strong> marché.<br />

— Je m’exerçais. Je m’exerçais sur <strong>le</strong>s arbres.<br />

— Personne ne t’empêche de t’exercer, mais pas ici, Jōtarō.<br />

As-tu oublié où tu es ? Ce jardin symbolise la paix <strong>et</strong> la pur<strong>et</strong>é.<br />

C’est un saint lieu consacré à la déesse qui est notre ancêtre à<br />

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