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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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serez d’accord avec moi : un feu est <strong>le</strong> meil<strong>le</strong>ur festin que l’on<br />

puisse offrir, par une froide nuit de neige, que l’on reçoive un<br />

prince ou un pauvre. Il y a une bonne provision de bois ; aussi,<br />

même si nous bavardons jusqu’au matin, je n’aurai pas besoin<br />

d’utiliser <strong>le</strong>s plantes en pot comme combustib<strong>le</strong>. Je vous en prie,<br />

m<strong>et</strong>tez-vous à l’aise.<br />

Le nob<strong>le</strong>, <strong>le</strong> marchand, l’artiste <strong>et</strong> <strong>le</strong> prêtre, assis jambes<br />

croisées près de l’âtre, tendaient <strong>le</strong>urs mains au-dessus du feu.<br />

Kōtsu réfléchissait sur la promenade glacia<strong>le</strong> pour venir de<br />

l’Ogiya, <strong>et</strong> l’invitation au feu de joie. Cela ressemblait en eff<strong>et</strong> à<br />

un festin ; c’était l’essence même de la fête.<br />

— ... Vous aussi, montez près du feu, dit Yoshino en<br />

adressant un sourire d’invite à Musashi, <strong>et</strong> en s’écartant<br />

légèrement pour lui faire place.<br />

Musashi était frappé par la nob<strong>le</strong> compagnie où il se<br />

trouvait. Après Toyotomi Hideyoshi <strong>et</strong> Tokugawa Ieyasu,<br />

Yoshino devait être la personne la plus célèbre du Japon. Bien<br />

sûr, il y avait Okuni, fameuse dans <strong>le</strong> Kabuki, <strong>et</strong> la maîtresse de<br />

Hideyoshi, Yodogimi ; pourtant, Yoshino passait pour avoir plus<br />

de classe que la première, <strong>et</strong> plus d’esprit, de beauté, de bonté<br />

que la seconde. Les hommes liés à Yoshino étaient surnommés<br />

<strong>le</strong>s « ach<strong>et</strong>eurs », tandis qu’el<strong>le</strong>-même était appelée « la Tayū ».<br />

Toute courtisane de premier rang était connue sous <strong>le</strong> nom de<br />

Tayū, mais « la Tayū » désignait Yoshino <strong>et</strong> nul<strong>le</strong> autre.<br />

Musashi avait ouï dire qu’el<strong>le</strong> avait sept suivantes pour la<br />

baigner, <strong>et</strong> deux pour lui couper <strong>le</strong>s ong<strong>le</strong>s.<br />

Ce soir-là, pour la première fois de sa vie, Musashi se<br />

trouvait en compagnie de dames peintes <strong>et</strong> polies ; il réagissait<br />

par une raideur cérémonieuse, en partie parce qu’il ne pouvait<br />

s’empêcher de se demander ce que <strong>le</strong>s hommes trouvaient de si<br />

extraordinaire à Yoshino.<br />

— ... Je vous en prie, détendez-vous, dit-el<strong>le</strong>. Venez-vous<br />

asseoir ici.<br />

Au bout de la quatrième ou cinquième invitation, il capitula.<br />

Prenant place à côté d’el<strong>le</strong>, il imita <strong>le</strong>s autres en tendant<br />

gauchement <strong>le</strong>s mains au-dessus du feu. Yoshino j<strong>et</strong>a un coup<br />

d’œil à la manche du jeune homme, <strong>et</strong> vit une tache rouge.<br />

Tandis que <strong>le</strong>s autres s’absorbaient dans la conversation,<br />

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