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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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Puis el<strong>le</strong> posa <strong>le</strong>s questions habituel<strong>le</strong>s : d’où venait-il ? ses<br />

parents vivaient-ils encore ? qui lui avait enseigné l’art du<br />

<strong>sabre</strong> ? <strong>et</strong> ainsi de suite.<br />

El<strong>le</strong> s’adressait à lui gentiment comme s’il eût été son p<strong>et</strong>itfils,<br />

ce qui ressuscita <strong>le</strong> p<strong>et</strong>it garçon en Musashi. Il se mit à<br />

par<strong>le</strong>r avec une spontanéité juvéni<strong>le</strong>. Habitué qu’il était à la<br />

discipline <strong>et</strong> à un entraînement rigoureux, à consacrer tout son<br />

temps à devenir une fine lame, il ne savait rien du côté plus<br />

civilisé de la vie. Tandis que la vieil<strong>le</strong> religieuse parlait, une<br />

cha<strong>le</strong>ur se répandait à travers <strong>le</strong> corps battu par <strong>le</strong>s intempéries<br />

du jeune homme.<br />

Myōshū, <strong>le</strong>s obj<strong>et</strong>s qui se trouvaient sur la couverture, <strong>le</strong> bol<br />

de thé lui-même, se fondaient subti<strong>le</strong>ment dans l’atmosphère<br />

pour devenir un élément de la nature. Mais Musashi était trop<br />

impatient, il avait <strong>le</strong> corps trop agité pour demeurer longtemps<br />

assis immobi<strong>le</strong>. C’était assez agréab<strong>le</strong> pendant qu’ils<br />

bavardaient, mais quand Myōshū se mit à contemp<strong>le</strong>r en si<strong>le</strong>nce<br />

la théière, <strong>et</strong> que Kō<strong>et</strong>su tourna <strong>le</strong> dos pour continuer son<br />

dessin, Musashi s’ennuya. « Que trouvent-ils de si amusant à<br />

venir ici ? Le printemps commence à peine. Il fait encore<br />

froid. »<br />

S’ils tenaient à cueillir des légumes sauvages, pourquoi ne<br />

pas attendre qu’il fit plus chaud <strong>et</strong> qu’il y eût plus de monde ?<br />

Alors, il y aurait des quantités de f<strong>le</strong>urs <strong>et</strong> de verdure. Et s’ils<br />

voulaient célébrer une cérémonie du thé, pourquoi se donner la<br />

peine d’emporter jusqu’ici la bouilloire <strong>et</strong> <strong>le</strong>s bols ? Une famil<strong>le</strong><br />

aussi connue <strong>et</strong> prospère que la <strong>le</strong>ur avait sûrement à la maison<br />

un élégant salon pour prendre <strong>le</strong> thé.<br />

Etait-ce pour dessiner ?<br />

En regardant <strong>le</strong> dos de Kō<strong>et</strong>su, il s’aperçut qu’en se<br />

déplaçant un peu sur <strong>le</strong> côté il pouvait suivre <strong>le</strong>s mouvements<br />

du pinceau. L’artiste, <strong>le</strong>s yeux fixés sur l’étroit ruisseau qui<br />

formait des méandres à travers l’herbe sèche, ne dessinait que<br />

<strong>le</strong>s lignes du courant. Il se concentrait sur <strong>le</strong> seul mouvement de<br />

l’eau, tentait sans cesse de capter celui du courant, mais <strong>le</strong><br />

sentiment exact paraissait lui échapper. Sans se décourager, il<br />

recommençait.<br />

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