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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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— Je regr<strong>et</strong>te de vous avoir fait attendre. Entrez donc.<br />

Il la conduisit à son bureau personnel ; mais avant de<br />

s’asseoir, il désigna <strong>le</strong>s obj<strong>et</strong>s qu’el<strong>le</strong> transportait <strong>et</strong> lui demanda<br />

ce que c’était. El<strong>le</strong> expliqua d’où ils venaient ; il lorgna <strong>le</strong>s <strong>sabre</strong>s<br />

d’un air soupçonneux.<br />

— ... Des dévots ordinaires ne viendraient pas ici avec des<br />

instruments pareils, dit-il. Et ils n’étaient pas là hier au soir.<br />

Quelqu’un doit s’être introduit dans l’enceinte au milieu de la<br />

nuit.<br />

Puis, avec une expression de dégoût, il grommela :<br />

— ... C’est peut-être une plaisanterie de samouraï, mais el<strong>le</strong><br />

ne m’amuse pas.<br />

— Oh ? Croyez-vous que l’on ait voulu donner à penser<br />

qu’un homme s’est introduit dans la Maison des Vierges ?<br />

— Oui, je <strong>le</strong> crois. En fait, c’est de cela que je voulais vous<br />

par<strong>le</strong>r.<br />

— Cela me concerne-t-il en quelque façon ?<br />

— Mon Dieu, je ne veux pas vous b<strong>le</strong>sser, mais voici <strong>le</strong>s faits.<br />

Un certain samouraï me reproche de vous avoir placée dans <strong>le</strong><br />

même dortoir que <strong>le</strong>s jeunes fil<strong>le</strong>s du sanctuaire. Il déclare me<br />

m<strong>et</strong>tre en garde dans mon propre intérêt.<br />

— Ai-je fait quelque chose qui vous porte tort ?<br />

— Inuti<strong>le</strong> de s’inquiéter. Seu<strong>le</strong>ment... mon Dieu, vous savez<br />

comme <strong>le</strong>s gens bavardent. Allons, ne vous fâchez pas, mais<br />

après tout vous n’êtes pas exactement une jeune fil<strong>le</strong>. Vous avez<br />

fréquenté des hommes, <strong>et</strong> <strong>le</strong>s gens disent que cela souil<strong>le</strong> <strong>le</strong><br />

sanctuaire que de faire habiter une femme qui n’est pas vierge<br />

avec <strong>le</strong>s jeunes fil<strong>le</strong>s de la Maison des Vierges.<br />

Arakida avait beau par<strong>le</strong>r d’un ton désinvolte, des larmes de<br />

colère inondèrent <strong>le</strong>s yeux d’Otsū. Il était vrai qu’el<strong>le</strong> avait<br />

beaucoup voyagé, qu’el<strong>le</strong> avait coutume de rencontrer des gens,<br />

qu’el<strong>le</strong> avait erré à travers l’existence avec ce vieil amour<br />

accroché à son cœur ; peut-être était-il tout naturel qu’on la prît<br />

pour une femme qui connaît la vie. Consternante expérience,<br />

pourtant, que de s’entendre accuser de n’être pas chaste, alors<br />

qu’en réalité el<strong>le</strong> l’était.<br />

Arakida ne semblait pas attacher beaucoup d’importance à<br />

la question. Seu<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong>s bavardages des gens l’ennuyaient, <strong>et</strong><br />

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