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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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d’œil, quelqu’un demandait : « Vous sortez, Otsū ? » <strong>La</strong><br />

question, <strong>le</strong> ton de voix avaient l’air innocents, mais el<strong>le</strong> en<br />

saisissait <strong>le</strong> sens. Et la seu<strong>le</strong> façon pour el<strong>le</strong> d’envoyer une l<strong>et</strong>tre<br />

était de la confier aux gens de l’auberge, <strong>le</strong>squels avaient reçu<br />

l’ordre de garder tout message qu’el<strong>le</strong> pouvait tenter d’expédier.<br />

Dans <strong>le</strong>s parages, Osugi était une espèce de célébrité, <strong>et</strong> <strong>le</strong>s<br />

gens se laissaient faci<strong>le</strong>ment convaincre de lui obéir. Bon<br />

nombre de boutiquiers, de porteurs de palanquin <strong>et</strong> de fardiers<br />

du voisinage l’avaient vue à l’œuvre l’année précédente,<br />

lorsqu’el<strong>le</strong> avait défié Musashi à Kiyomizudera, <strong>et</strong>, malgré toute<br />

son irascibilité, ils la considéraient avec un certain respect<br />

affectueux.<br />

Tandis qu’Otsū faisait une tentative de plus pour finir de<br />

réassemb<strong>le</strong>r <strong>le</strong> costume de voyage d’Osugi, que l’on avait<br />

décousu pour <strong>le</strong> laver, une ombre apparut au-dehors. Otsū<br />

entendit une voix qu’el<strong>le</strong> ne connaissait pas :<br />

— Je me demande si je me suis trompée d’endroit.<br />

Une jeune femme, entrée par <strong>le</strong> couloir qui venait de la rue,<br />

se tenait sous un prunier, entre deux carrés de cibou<strong>le</strong>. El<strong>le</strong><br />

paraissait nerveuse, un peu gênée, mais peu désireuse de<br />

rebrousser chemin.<br />

— ... N’est-ce pas l’auberge ? Il y a une lanterne à l’entrée du<br />

passage, qui l’indique, dit-el<strong>le</strong> à Otsū.<br />

Cel<strong>le</strong>-ci pouvait à peine en croire ses yeux tant <strong>le</strong> souvenir<br />

soudain réveillé la faisait souffrir. Croyant s’être trompée,<br />

Akemi demanda timidement :<br />

— ... L’auberge, c’est quel bâtiment ?<br />

Puis, regardant autour d’el<strong>le</strong>, el<strong>le</strong> remarqua <strong>le</strong>s f<strong>le</strong>urs de<br />

prunier, <strong>et</strong> s’exclama :<br />

— ... Dieu qu’el<strong>le</strong>s sont jolies !<br />

Sans répondre, Otsū dévisagea la jeune fil<strong>le</strong>. Un employé,<br />

appelé par une des fil<strong>le</strong>s de cuisine, accourut de l’ang<strong>le</strong> de<br />

l’auberge.<br />

— Vous cherchez l’entrée ? demanda-t-il.<br />

— Oui.<br />

— C’est au coin, tout de suite à droite du passage.<br />

— L’auberge donne directement sur la rue ?<br />

— Oui, mais <strong>le</strong>s chambres sont calmes.<br />

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