14.12.2018 Views

La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

El<strong>le</strong> remit <strong>le</strong> luth en place <strong>et</strong> r<strong>et</strong>ourna vers <strong>le</strong> feu. Quand <strong>le</strong>s<br />

hommes se <strong>le</strong>vèrent pour prendre congé, Musashi, heureux que<br />

son ennui cessât, fut <strong>le</strong> premier à gagner la porte. Yoshino dit au<br />

revoir aux autres, un par un, mais ne lui dit rien à lui. Comme il<br />

se r<strong>et</strong>ournait pour partir, el<strong>le</strong> <strong>le</strong> saisit doucement par la manche.<br />

— Musashi, passez donc ici la nuit. Pour une raison<br />

quelconque... je ne veux pas vous laisser rentrer chez vous.<br />

Le visage d’une vierge importunée n’aurait pu être plus<br />

rouge. Il essaya de sauver la face en faisant la sourde oreil<strong>le</strong>,<br />

mais <strong>le</strong>s autres ne doutaient pas un seul instant qu’il était trop<br />

troublé pour répondre.<br />

Se tournant vers Shōyū, Yoshino demanda :<br />

— ... Il n’y a pas d’inconvénient à ce que je <strong>le</strong> garde ici, n’estce<br />

pas ?<br />

Musashi écarta de sa manche la main de Yoshino.<br />

— Non, je pars avec Kō<strong>et</strong>su.<br />

Comme il se hâtait de gagner la porte, Kō<strong>et</strong>su l’arrêta :<br />

— Ne soyez pas ainsi, Musashi. Pourquoi ne vou<strong>le</strong>z-vous pas<br />

rester ici, c<strong>et</strong>te nuit ? Vous pouvez rentrer chez moi demain.<br />

Après tout, c<strong>et</strong>te dame a eu la bonté de vous témoigner de<br />

l’intérêt.<br />

Et il alla rejoindre <strong>le</strong>s deux autres.<br />

<strong>La</strong> prudence de Musashi l’avertissait qu’ils essayaient<br />

délibérément de l’amener par la ruse à rester pour s’en égayer<br />

ensuite. Pourtant, la gravité qu’il voyait peinte sur <strong>le</strong>s visages de<br />

Yoshino <strong>et</strong> Kō<strong>et</strong>su démentait <strong>le</strong> fait qu’il pût s’agir d’une<br />

plaisanterie.<br />

Shōyū <strong>et</strong> Mitsuhiro, fort amusés par la gêne de Musashi,<br />

continuaient à <strong>le</strong> taquiner, l’un disant : « Vous êtes l’homme <strong>le</strong><br />

plus chanceux du pays », <strong>et</strong> l’autre se portant volontaire pour<br />

rester à sa place.<br />

<strong>La</strong> plaisanterie cessa avec l’arrivée d’un serviteur que<br />

Yoshino avait envoyé surveil<strong>le</strong>r <strong>le</strong> quartier. Il avait <strong>le</strong> souff<strong>le</strong><br />

court, <strong>et</strong> ses dents claquaient de frayeur.<br />

— Les autres messieurs peuvent s’en al<strong>le</strong>r, déclara-t-il, mais<br />

Musashi n’y devrait pas songer. A c<strong>et</strong>te heure, seu<strong>le</strong> la porte<br />

principa<strong>le</strong> est ouverte ; des deux côtés de c<strong>et</strong>te porte, autour de<br />

la maison de thé Amigasa <strong>et</strong> au long de la rue, une fou<strong>le</strong> de<br />

730

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!