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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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qu’un chaton. Bien que la face fût voilée, il crut avoir aperçu des<br />

cheveux blancs. Sans s’arrêter pour analyser ces impressions, il<br />

empoigna son <strong>sabre</strong> <strong>et</strong> sortit en courant sur la véranda.<br />

— Halte ! cria-t-il. Puisque vous vous êtes donné la peine de<br />

venir jusqu’ici, perm<strong>et</strong>tez-moi de vous recevoir comme il<br />

convient !<br />

Il sauta à terre <strong>et</strong> courut vers <strong>le</strong> bruit des pas qui battaient<br />

en r<strong>et</strong>raite. Mais <strong>le</strong> cœur n’y était pas. Au bout de quelques<br />

secondes, il s’arrêta <strong>et</strong> regarda en riant quelques prêtres<br />

disparaître dans l’obscurité.<br />

Osugi, après son atterrissage à se rompre <strong>le</strong>s os, gisait au sol<br />

<strong>et</strong> gémissait de dou<strong>le</strong>ur.<br />

— ... Comment, grand-mère, c’est vous ! s’exclama-t-il,<br />

surpris que son assaillant ne fût ni un homme de Yoshioka ni<br />

l’un des prêtres en colère.<br />

Il l’entoura de son bras pour l’aider à se re<strong>le</strong>ver.<br />

— ... Maintenant, je commence à comprendre, dit-il. C’est<br />

vous qui avez dit aux prêtres des tas de méchanc<strong>et</strong>és sur moi,<br />

hein ? Et comme c<strong>et</strong>te histoire émanait d’une vieil<strong>le</strong> dame<br />

courageuse <strong>et</strong> comme il faut, ils l’ont crue de A jusqu’à Z, je<br />

suppose.<br />

— Oh ! que j’ai mal au dos !<br />

Osugi ne confirma ni n’infirma son accusation. El<strong>le</strong> se<br />

tortillait bien un peu, mais il lui manquait la force d’opposer<br />

une grande résistance. El<strong>le</strong> dit faib<strong>le</strong>ment :<br />

— ... Musashi, au point où nous en sommes, il est inuti<strong>le</strong> de<br />

s’inquiéter du bien <strong>et</strong> du mal. <strong>La</strong> maison de Hon’iden a été<br />

malchanceuse à la guerre ; aussi, contente-toi de me couper la<br />

tête maintenant.<br />

Il paraissait peu vraisemblab<strong>le</strong> à Musashi qu’il ne s’agît là<br />

que de théâtre. Les paro<strong>le</strong>s d’Osugi semblaient <strong>le</strong>s paro<strong>le</strong>s<br />

sincères d’une femme qui était allée aussi loin qu’el<strong>le</strong> <strong>le</strong> pouvait,<br />

<strong>et</strong> voulait s’arrêter là.<br />

— Vous souffrez ? demanda-t-il en refusant de la prendre au<br />

sérieux. Où donc avez-vous mal ? Vous pouvez rester ici c<strong>et</strong>te<br />

nuit ; aussi, il n’y a pas d’inquiétude à avoir.<br />

Il la sou<strong>le</strong>va dans ses bras, la porta à l’intérieur <strong>et</strong> l’étendit<br />

sur sa couche. Assis à son chev<strong>et</strong>, il la soigna toute la nuit.<br />

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