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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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claire – idéa<strong>le</strong>, disait-on, pour faire <strong>le</strong> thé. Les f<strong>le</strong>urs de prunier<br />

de Tsukigase étaient proches, <strong>et</strong> <strong>le</strong>s rossignols chantaient de la<br />

saison de la fonte des neiges à cel<strong>le</strong> des orages ; <strong>le</strong>urs sonorités<br />

de cristal étaient aussi limpides que <strong>le</strong>s eaux montagnardes.<br />

Un poète a jadis écrit qu’« à l’endroit où naît un héros,<br />

montagnes <strong>et</strong> rivières sont fraîches <strong>et</strong> claires ». Si nul héros<br />

n’était né dans la vallée de Yagyū, ces paro<strong>le</strong>s du poète eussent<br />

été vides de sens ; mais ce lieu avait effectivement vu naître des<br />

héros. Les seigneurs de Yagyū eux-mêmes en fournissaient la<br />

meil<strong>le</strong>ure preuve. Dans c<strong>et</strong>te grande maison, même <strong>le</strong>s<br />

serviteurs étaient des nob<strong>le</strong>s. Beaucoup venaient des rizières,<br />

s’étaient distingués au combat, <strong>et</strong> étaient devenus des assistants<br />

loyaux <strong>et</strong> compétents.<br />

Yagyū Muneyoshi Sekishūsai, maintenant qu’il s’était r<strong>et</strong>iré,<br />

résidait dans une maisonn<strong>et</strong>te montagnarde, à quelque distance<br />

derrière la Grande Maison. Il ne manifestait plus aucun intérêt<br />

pour <strong>le</strong> gouvernement local, <strong>et</strong> ignorait tota<strong>le</strong>ment qui<br />

gouvernait. Il avait un certain nombre de fils <strong>et</strong> de p<strong>et</strong>its-fils<br />

capab<strong>le</strong>s, ainsi que des serviteurs dignes de confiance pour <strong>le</strong>s<br />

assister <strong>et</strong> <strong>le</strong>s conseil<strong>le</strong>r ; il supposait donc à juste titre que la<br />

population se trouvait aussi bien gouvernée qu’à l’époque où il<br />

était aux affaires.<br />

Quand Musashi arriva dans c<strong>et</strong>te province, une dizaine de<br />

jours s’étaient écoulés depuis la batail<strong>le</strong> de la plaine de Hannya.<br />

En route, il avait visité des temp<strong>le</strong>s, Kasagidera <strong>et</strong> Jōruriji, où il<br />

avait vu des reliques de l’époque Kemmu. Il descendit à<br />

l’auberge loca<strong>le</strong> avec l’intention de se détendre un peu,<br />

physiquement <strong>et</strong> spirituel<strong>le</strong>ment.<br />

En tenue négligée, il sortit un jour se promener avec Jōtarō.<br />

— C’est stupéfiant, disait Musashi dont <strong>le</strong>s yeux erraient sur<br />

<strong>le</strong>s récoltes champêtres <strong>et</strong> <strong>le</strong>s paysans qui s’adonnaient à <strong>le</strong>urs<br />

travaux. Stupéfiant, répéta-t-il plusieurs fois.<br />

Jōtarō finit par demander :<br />

— Qu’est-ce qui est stupéfiant ?<br />

Pour lui, <strong>le</strong> plus stupéfiant c’était la façon qu’avait Musashi<br />

de par<strong>le</strong>r tout seul.<br />

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