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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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ien que son teint plutôt sombre fût profondément grêlé, son<br />

agréab<strong>le</strong> modestie justifiait en quelque sorte ces défauts. En des<br />

endroits tels que l’Ōgiya, un étranger n’eût jamais deviné qu’il<br />

était l’un des nob<strong>le</strong>s du rang <strong>le</strong> plus é<strong>le</strong>vé de Kyoto, <strong>le</strong> chef de la<br />

famil<strong>le</strong> où l’on choisissait des régents impériaux. Souriant d’un<br />

air affab<strong>le</strong>, au côté de Yoshino, il se tourna vers el<strong>le</strong> <strong>et</strong> dit :<br />

— C’est bien la voix de M. Funabashi, n’est-ce pas ?<br />

El<strong>le</strong> se mordit <strong>le</strong>s lèvres, déjà plus rouge qu’une f<strong>le</strong>ur de<br />

prunier, <strong>et</strong> ses yeux trahirent son embarras devant la situation<br />

où el<strong>le</strong> se trouvait.<br />

— Que ferai-je s’il entre ? demanda-t-el<strong>le</strong> avec nervosité.<br />

— Ne vous <strong>le</strong>vez pas ! lui ordonna <strong>le</strong> seigneur Karasumaru<br />

en empoignant <strong>le</strong> pan de son kimono. Takuan, que fabriquezvous<br />

donc là-bas ? Il fait froid avec la porte ouverte. Si vous<br />

sortez, sortez, <strong>et</strong> si vous rentrez, rentrez, mais fermez la porte.<br />

— Entrez donc, dit Takuan à Shōyū en avalant l’appât <strong>et</strong> en<br />

entraînant <strong>le</strong> vieil homme dans la pièce.<br />

Shōyū traversa la chambre, <strong>et</strong> s’assit aussitôt en face des<br />

deux nob<strong>le</strong>s.<br />

— Mon Dieu, quel<strong>le</strong> bonne surprise ! s’exclama Mitsuhiro<br />

avec une sincérité feinte.<br />

Shōyū, sur ses genoux osseux, se rapprocha. Tendant la<br />

main vers Nobutada, il dit :<br />

— Donnez-moi du saké.<br />

Ayant reçu la coupe, il s’inclina avec une cérémonie<br />

exagérée.<br />

— Ça me fait plaisir de vous voir, mon vieux Funabashi, dit<br />

Nobutada avec un large sourire. Vous paraissez toujours en<br />

p<strong>le</strong>ine forme.<br />

Shōyū vida la coupe <strong>et</strong> la rendit.<br />

— Je n’imaginais pas une seconde que <strong>le</strong> seigneur Kangan<br />

avait pour compagnon Votre Excel<strong>le</strong>nce.<br />

Feignant toujours d’être plus ivre qu’il ne l’était en réalité, il<br />

secoua comme un vieux val<strong>et</strong> son maigre cou ridé, <strong>et</strong> dit avec<br />

une frayeur simulée :<br />

— ... Pardonnez-moi, estimée Excel<strong>le</strong>nce !<br />

Puis, changeant de ton :<br />

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