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La pierre et le sabre - Eiji Yoshikawa

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Tous l’aidèrent à se m<strong>et</strong>tre au lit ; quelqu’un ramassa<br />

l’oreil<strong>le</strong>r que l’on avait écarté d’un coup de pied, <strong>et</strong> <strong>le</strong> lui mit<br />

sous la tête. Aussitôt que Baiken eut fermé <strong>le</strong>s yeux, un<br />

ronf<strong>le</strong>ment sonore remplaça la colère qui l’avait rempli.<br />

Les hommes se saluèrent l’un l’autre de la tête <strong>et</strong> se<br />

dispersèrent dans la brume du p<strong>et</strong>it matin. C’était de la racail<strong>le</strong> :<br />

sous-ordres de pillards comme Tsujikaze Temma d’Ibuki <strong>et</strong><br />

Tsujikaze Kōhei de Yasugawa, qui se faisait maintenant appe<strong>le</strong>r<br />

Shishido Baiken. A moins qu’ils ne fussent des parasites au bas<br />

de l’échel<strong>le</strong> socia<strong>le</strong>. Poussés par <strong>le</strong>s temps nouveaux, ils étaient<br />

devenus cultivateurs, artisans ou chasseurs, mais ils avaient<br />

encore des crocs qui n’étaient que trop prêts à mordre <strong>le</strong>s<br />

honnêtes gens lorsque l’occasion s’en présentait.<br />

Dans la maison, l’on n’entendait que <strong>le</strong> souff<strong>le</strong> des<br />

dormeurs.<br />

A l’ang<strong>le</strong> du couloir qui reliait l’atelier à la cuisine, à côté<br />

d’un grand four en terre, se dressait une pi<strong>le</strong> de bois à brû<strong>le</strong>r.<br />

Au-dessus pendaient un parapluie <strong>et</strong> de grosses pè<strong>le</strong>rines de<br />

pail<strong>le</strong> contre la pluie. Dans l’ombre, entre <strong>le</strong> four <strong>et</strong> <strong>le</strong> mur, une<br />

des capes imperméab<strong>le</strong>s remua ; si<strong>le</strong>ncieuse, el<strong>le</strong> s’é<strong>le</strong>va contre<br />

<strong>le</strong> mur, centimètre par centimètre, jusqu’à ce qu’el<strong>le</strong> fût pendue<br />

à un clou.<br />

<strong>La</strong> silhou<strong>et</strong>te d’un homme, noircie par la fumée, parut<br />

soudain sortir de la murail<strong>le</strong> el<strong>le</strong>-même. A aucun moment,<br />

Musashi n’avait quitté d’un pas la maison. Après s’être glissé<br />

hors des couvertures, il avait ouvert la porte extérieure, puis<br />

s’était confondu avec <strong>le</strong> bois à brû<strong>le</strong>r en abaissant sur lui la cape<br />

imperméab<strong>le</strong>.<br />

En si<strong>le</strong>nce, il traversa la forge <strong>et</strong> regarda Baiken.<br />

« Végétations », diagnostiqua Musashi : Baiken ronflait<br />

vio<strong>le</strong>mment. <strong>La</strong> situation lui parut drô<strong>le</strong>, <strong>et</strong> il eut un large<br />

sourire.<br />

Il se tint là quelques instants à réfléchir. De toute manière,<br />

il avait gagné sa passe d’armes avec Baiken. N<strong>et</strong>te victoire.<br />

Pourtant, l’homme étendu là, frère de Tsujikaze Temma, avait<br />

tenté de l’assassiner pour apaiser l’âme de son frère mort...<br />

admirab<strong>le</strong> sentiment pour un simp<strong>le</strong> pillard.<br />

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