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publia César Antechrist, drame en trois actes. La première et la troisième partie semblaient une<br />

gageure pour stupéfier les entendements les moins prévenus [...] 1 ». Dès 1894, Gustave Kahn,<br />

auteur bien connu de La Revue blanche, écrit à propos des Minutes (dans La Société nouvelle) : « […] le<br />

premier livre de l’auteur, donne immédiatement la sensation qu’on a affaire à quelqu’un, à un<br />

artiste expert et doué d’idées. L’abondance trop grande du mot, la recherche excessive et pas<br />

toujours heureuse de la métaphore, les menues tares du travail de transcription et des<br />

exagérations fréquentes de pensée ne peuvent détruire cette opinion favorable […]. Quand M.<br />

Jarry sera devenu d’expression plus simple, nul doute qu’il ne nous donne d’excellentes pages. 2 »<br />

Jarry ne pouvait ignorer ces critiques répétées à l’encontre de son style qui font aussi figure à<br />

chaque fois de conseils. Et Rachilde va jusqu’à souhaiter « amener [Jarry] à écrire « comme tout le<br />

monde » 3 » : elle se vantera d’avoir réussi à faire qu’il y parvienne.<br />

L’auteur de L’Animale semble supprimer ici la connotation négative apparemment rattachée à<br />

cette formulation lorsqu’elle est usitée au sein des petites revues animées par un véritable souci<br />

d’art, et particulièrement ainsi dans Le Mercure de France à ses débuts, montrant de ce fait à quel<br />

point la clarté pouvant être perçue dans le sens d’une simplification demeure primordiale afin de<br />

pouvoir toucher un large lectorat, ce conseil de Rachilde naissant probablement de l’expression<br />

du désir de Jarry de pouvoir vivre davantage de sa plume : écrire comme tout le monde devient<br />

ainsi pouvoir « être l[u] par tout le monde 4 », comme le remarque Charles Merki à propos de Poésies<br />

variées et nouveaux chats d’Alfred Ruffin (Jouaust). Merki dans son compte rendu de La Peine de<br />

l’Esprit de Maurice Pottecher (Fischbacher) inséré dans Le Mercure de France en 1891 écrit ainsi :<br />

« Par ses tendances philosophiques, l’idée si curieuse qu’il recèle, je trouve véritablement ce<br />

poème très bien. C’est si rare de rencontrer un livre qui ne soit pas le livre de tout le monde. 5 »<br />

L’année suivante, dans la même revue, Merki notera au sujet cette fois de Sur la Mandoline de<br />

Marcel Sérizolles (Ollendorf) que cet ouvrage « ne contien[t] rien, hormis les choses de tout le<br />

monde 6 ». Et du reste c’est ce sens que Jarry privilégiera jusqu’à la fin de son existence, quels que<br />

soient les conseils proférés par Rachilde, puisqu’il avance dans son compte rendu de Ixion de<br />

Fagus : « [...] il nous semblerait que ce n’est déjà pas là la besogne de tout le monde. 7 »<br />

1<br />

L’Ermitage, volume 13, juillet-décembre 1896, p. 117.<br />

2<br />

Gustave Kahn, « La Vie mentale », La Société nouvelle, n° 119, t. II, novembre 1894, p. 611-612 –<br />

cité par Julien Schuh, « Jarry à la lumière de la critique (1894-1897) », L’Etoile-absinthe, tournées<br />

123-124, Paris & Tusson, SAAJ & Du Lérot éditeur, 2010, p. 141.<br />

3<br />

François Caradec, À la recherche de Alfred Jarry, Seghers, collection « Insolites », cahier 12, 1974, p.<br />

8.<br />

4<br />

Le Mercure de France, n° 13-18, tome II, janvier-juin 1891, p. 314.<br />

5<br />

Le Mercure de France, n° 19-24, tome III, juillet-décembre 1891, p. 365.<br />

6<br />

Le Mercure de France, n° 33-36, tome VI, septembre-décembre 1892, p. 275.<br />

7 OC II, p. 676.<br />

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