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concernant, de par la formulation hyperbolique « trop truculentes », mais il faut en réalité analyser<br />

ce silence – s’exprimant en vérité sous forme d’une prétérition pour ses proches et les<br />

connaisseurs du livre – comme le signe d’une pudeur : « Les Anglais se retirèrent. Le lendemain<br />

ils résolurent d’aller tous chez le Roi Ubu. Il fallait voir les têtes couronnées, épuiser les<br />

influences. Ubu était de bonne humeur. Voyant la Cour d’Angleterre qui s’approchait, il s’écria : –<br />

Qu’on m’apporte le crochet et le couteau à Nobles et mon croc à finances ! – Sire, dit<br />

humblement Hamlet, nous ne venons point ici faire un assaut, et d’autre part nous n’avons plus<br />

d’argent ! – Faites vos besoins ! Marchez dedans ! Vous en aurez ! s’écria Ubu. Qui êtes-vous,<br />

sacs-à-vin et bouffres ? Hamlet se nomma, présenta sa suite. – Ah ! les sagouins ! dit Ubu. Il cria :<br />

- Mère Ubu ! Mère Ubu ! Une voix aigre répondit : – Je racle des fourneaux ! – Reste-t-il du chou-<br />

fleur à la merdre ? cria Ubu. –Tes invités ont tout boulotté, père Ubu ! – Des goinfres ! s’écria<br />

Ubu. Alors il dit aux Anglais : – Par ma chandelle verte, je n’ai à vous octroyer qu’une torsion du<br />

nez ! Eloignez vos fioles ! Ou je vous fais extraire la cervelle par les talons, oiseaux de nuit ! 1 »<br />

— Jarry tait ordinairement le fait de la critique d’amitié.<br />

Cette pudeur n’est pas le fait de l’exceptionnel : Jarry la manifeste également dans son<br />

compte rendu du livre de souvenirs de Louise France, ne mentionnant pas qu’elle a joué le rôle<br />

de la mère Ubu au théâtre de l’Œuvre, ou dans la bibliographie de Contes et nouvelles suivis de<br />

Théâtre de Rachilde, n’indiquant pas que l’une des nouvelles lui est dédiée.<br />

Remarquons en outre que même s’il évoque le conte d’Herold qui lui est dédicacé : « La<br />

lépreuse et le mulet » en termes louangeurs dans son compte rendu de Contes du Vampire, Jarry tait<br />

également la dédicace dans le fil du compte rendu.<br />

Pour finir, il fait silence sur la façon dont la septième scène de L’Abbé Prout intitulée « Le<br />

Sabre et le Goupillon 2 » lui est dédiée, dans la bibliographie qu’il publie de cet ouvrage au sein de<br />

La Revue blanche. Ce silence, dans ce dernier cas, doit être d’autant plus interrogé qu’il faut<br />

remarquer que la lecture que fait Jarry de L’Abbé Prout de Paul Ranson, « guignol pour les vieux<br />

enfants » paru au Mercure de France en 1902, a pu l’inspirer dans l’écriture de La Dragonne, du<br />

moins dans la trouvaille du titre puisqu’au sein de la scène qui lui est adressée, l’on trouve cette<br />

réplique de Clotilde à Mère La Victoire : « nous aurons pour déjeuner : œufs à la dragonne... 3 », à<br />

1 Id., p. 70-73. Voir aussi Id., p. 48 : « – C’est juste. Quels journaux avons-nous ? – Des<br />

publications françaises, Sire ! Le Sourire, la Plume, l’Almanach du Père Ubu. Nous sommes aussi<br />

abonnés au Tu-Tu, au Frou-Frou. »<br />

2 Voir Id., p. 263.<br />

3 Id., p. 268.<br />

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