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chronique du 9 février 1866 » ; et, « comme certains auteurs étrillés » protestèrent<br />

« vigoureusement », il la transforma en « Livres que je n’ai pu lire », « à peine moins<br />

désobligeante pour ceux qui sont cités 1 », comme le remarquent Gérard Delfau et Anne Roche.<br />

1. 4. 2. Le critique a l’inaliénable statut d’un juge.<br />

L’auteur de Messaline, s’il veut néanmoins (ce « néanmoins » devant être nuancé car il n’y a pas<br />

contradiction entre l’apologie du Même et la haine exprimée à l’encontre de l’altérité, fût-elle figée<br />

sous forme de stéréotypes : ce sont même les deux modalités principales de l’éloge de Soi) le plus<br />

souvent faire du compte rendu l’expression d’une sympathie et d’une admiration dirigées vers un<br />

auteur (il est vrai presque toujours ami), ne fait toutefois nullement figure d’exception, se plaçant<br />

dans la lignée de Remy de Gourmont qui rappelle dans sa préface au II ème Livre des Masques :<br />

« « Quand on ne parle pas des choses avec une partialité pleine d’amour ce qu’on ne dit ne vaut<br />

pas la peine d’être rapporté. » Ces paroles – qui valent la peine d’être rapportées – sont de<br />

Goethe. Deux critiques : l’une négative, l’autre positive. 2 » Et d’ajouter, de très explicite façon :<br />

« La critique négative veut s’exprimer avec une impartialité pleine de haine ; elle se fait tribunal,<br />

évoque des coupables et les juge avec un stérile effort de conscience. Elle dit qu’un livre est<br />

mauvais, qu’un tableau est mauvais ; elle appelle le bourreau afin que le bûcher soit allumé.<br />

« Regarde et passe » – la critique négative n’a jamais ni cette indépendance, ni cette abnégation.<br />

Elle regarde, s’arrête, et crie son jugement. 3 »<br />

Et du reste Alfred Capus résumera-t-il ainsi la visée de la critique judicatrice : « S’il vaut<br />

mieux, dans une société, acquitter dix coupables que de condamner un innocent, c’est le contraire<br />

en littérature. Là, ce qui est grave, ce qui est d’un exemple désolant, c’est d’acquitter le coupable,<br />

c’est-à-dire de désigner brusquement à l’admiration publique une œuvre médiocre. Il est moins<br />

dangereux de laisser dans l’ombre une œuvre de valeur. Celle-ci, tôt ou tard, finit par en<br />

sortir [...] 4 ».<br />

Pierre Quillard lui-même va jusqu’à écrire dans Le Mercure de France en 1892, à l’occasion de<br />

son compte rendu de Les Vergers illusoires d’André Fontainas (Librairie de l’Art Indépendant) :<br />

« Ne pourrait-on, pour une fois, croire sur parole le critique, ce juge qui n’a pas plus que les autres<br />

1<br />

Gérard Delfau & Anne Roche, Histoire, littérature, histoire et interprétation du fait littéraire, Éditions<br />

du Seuil, 1977, p. 43.<br />

2<br />

Propos cité par Jill Fell, Alfred Jarry, An Imagination in Revolt, Madison, Teaneck, Fairleigh<br />

Dickinson University Press, 2005, p. 104.<br />

3<br />

Ibid.<br />

4<br />

Proposé cité par Alain-Fournier, Chroniques et critiques, textes réunis et présentés par André<br />

Guyon, Le Cherche midi éditeur, collection « amor fati », p. 90.<br />

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