30.06.2013 Views

thèse

thèse

thèse

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

3. Ce présent de vérité générale fait sens : il ne s’agit pas de considérer l’éloge de Jarry comme<br />

un jugement personnel mais bien comme la constatation d’une réalité, ne pouvant être contestée.<br />

Par cette seule remarque toute possibilité de critique est-elle étouffée.<br />

Aussi le critique n’a-t-il aucun rôle, et, de fait, aucun statut : il finit par s’effacer tout entier<br />

derrière l’œuvre dont il rend compte.<br />

C’est pour cette raison que le compte-rendu de Modestie et Vanité de Péladan que Jarry<br />

publiera dans La Revue blanche presque un an plus tard, soit le 1 er mars 1903, est presque<br />

entièrement constitué d’un montage de citations dissimulées.<br />

4. L’on reprocha beaucoup à Péladan d’écrire trop et trop vite, et par conséquent d’être très<br />

inégal : Charles Merki rendant compte de Cœur en peine dans Le Mercure de France de décembre<br />

1890 reproche à cette « œuvre » d’être « hâtivement écrite 1 ».<br />

Remarquons que Péladan reconnaît lui-même cette remarque comme n’étant pas infondée,<br />

même si selon lui elle ne doit pas déchaîner un jugement négatif.<br />

Certes, si la publication est régulière, c’est pour permettre à l’auteur de vivre : Nergal, double<br />

de Péladan, devait « écrire deux romans annuels 2 » ; le corollaire de cette récurrence dans la<br />

publication est logiquement le fait d’écrire avec rapidité.<br />

Mais, pour Péladan, cette façon d’écrire est surtout le signe d’une écriture qui est fondée sur<br />

la recherche de la plus grande fusion possible entre l’idiosyncrasie et un acte pouvant se<br />

poursuivre continument (celui d’écrire), si l’on considère, ce qui semble évident, que le portrait de<br />

Nergal qu’il dresse dans Istar est un autoportrait : « Redoutant son propre jugement et se<br />

moquant de celui public, Nergal ne relisait pas ses manuscrits ; il jetait sa pensée telle que<br />

l’inspiration la dictait, ne la revoyant plus que sous la forme dépersonnalisée de l’impression. Il<br />

s’évitait la tentation de refaire, le souci de parfaire, et aux amis qui déploraient quelques hâtes de<br />

style : « Mieux me vaut d’échapper à ma critique que de satisfaire à la vôtre. » 3 »<br />

Nergal se rapproche ici de Sengle dans Les Jours et les Nuits qui « construisait ses littératures,<br />

curieusement et précisément équilibrées, par des sommeils d’une quinzaine de bonnes heures,<br />

après manger et boire ; et éjaculait en une écriture de quelque méchante demi-heure le résultat 4 ».<br />

Néanmoins, cette rapidité dans l’écriture et la publication n’est pas uniquement le signe pour<br />

l’auteur de La Décadence latine d’une volonté d’offrir par le biais du roman une image de<br />

l’inspiration qui ne soit pas dénaturée par le travail mais s’affirme également paradoxalement<br />

1 Le Mercure de France, n° 1-12, op. cit.<br />

2 Péladan, La Décadence latine, éthopée [V], Istar, op. cit., p. 50.<br />

3 Id., p 162.<br />

4 Bouquin, p. 590.<br />

1180

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!