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conséquent vers l’obscurité qui y est, à cette époque, dans l’esprit de Jarry, ontologiquement<br />

rattachée).<br />

Dans ces poèmes sur Munthe parus au sein des Minutes, la critique (toute critique possible) est<br />

prise de cours par le poème qui se veut non pas invitation à découvrir l’œuvre du peintre (comme<br />

on pourrait le penser de prime abord) mais proclamation de l’identité d’un critique pictural (Jarry)<br />

dissimulé (et tu) dans une geste poétique, prétendument au sein même d’une œuvre picturale qui<br />

a force de singularité.<br />

Cette dernière singularité reste présente essentiellement à titre de virtualité car elle est<br />

totalement occultée par la singularité du critique poète, à savoir Jarry : c’est bien, paradoxe<br />

fécond, uniquement la singularité de Jarry qui rend visible celle de Munthe.<br />

Il s’agit par conséquent de la proclamation d’une singularité (d’un goût) grâce prétendument à<br />

l’affirmation rendue effective par le biais de l’œuvre poétique de la singularité d’une œuvre<br />

picturale – et du reste Jarry pour signifier la singularité de l’œuvre picturale n’a-t-il nullement<br />

besoin de la proclamer : le simple fait qu’il écrive à partir d’elle, que des poèmes puissent naître de<br />

détails présents en son sein a force bien évidemment d’aveu en ce sens.<br />

4. 1. 5. L’ensemble « Tapisseries » tourné vers Fort, lui-même tourné vers Le Mercure.<br />

En outre, le terme « Tapisseries » lui-même doit être interrogé. Il renvoie à un univers pictural<br />

fortement coloré, avec des teintes abruptes, d’un seul tenant, sans mélange (et « La Peur » de<br />

débuter par deux couleurs simples s’opposant fortement : blanc et rouge – lequel est dénommé<br />

par la périphrase « roses de feu »), comme celles des images d’Epinal (« Tant pis pour qui ne sait<br />

d’Epinal que son cru fatras superficiel, non son unique, lorraine ou allemande, vérité et<br />

excellence 1 ») que Jarry affectionnait extrêmement, enthousiasme qu’il partageait alors quasiment<br />

au quotidien avec Remy de Gourmont ou encore Paul Fort.<br />

Justement, lorsque Jarry rend compte de Plusieurs choses de Paul Fort dans L’Art littéraire en<br />

mars 1894 (il s’agit précisément du numéro double 3-4 de mars-avril), recueil qui vient de paraître<br />

à la Librairie de l’Art indépendant (et que Jarry ne peut manquer de lire aussitôt avec intérêt, en<br />

raison des liens qu’il entretient avec Paul Fort et de la façon dont ce dernier communique avec<br />

l’univers du Mercure de France), environ six mois avant que le recueil des Minutes ne paraisse lui-<br />

même (puisque ce dernier sort des presses le 5 octobre 1894), c’est cette dimension colorée<br />

propre aux tapisseries (cette hardiesse dans le ton, cette impossibilité de nuances et de mélanges)<br />

1 OC I, p. 1026.<br />

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