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Aussi, la lecture de Jarry n’est plus seulement humoristique (contrairement à ce qu’elle<br />

semble être entièrement, et outrageusement – voir la note 6) ou exégétique (en ce qui concerne le<br />

court paragraphe par quoi se clôt le compte rendu de Jarry, ainsi que nous l’avons déjà suggéré) :<br />

elle s’impose avec une telle force qu’elle balaye toute lecture antérieure, et jusqu’au sens du texte<br />

sur lequel elle se construit, autour duquel elle s’enroule de ses ramifications denses au point de le<br />

soustraire au regard.<br />

Et Jarry impose son propos d’une façon telle (même s’il cite, paradoxalement, un passage de<br />

l’introduction de l’ouvrage, et ouvre son compte rendu sur cette citation, façon d’apparemment<br />

laisser toute sa place à l’auteur qu’il chronique – et de faire apparaître très visiblement cette<br />

volonté, même si ce n’est que dans un premier temps, car Jarry prend très vite ses distances avec<br />

Dubois-Desaulle) que celui-ci va jusqu’à sembler aux yeux des lecteurs de La Revue blanche, Jarry<br />

étant légitimité dans son discours (et dans le fait de l’énonciation de celui-ci) par la partie dévolue<br />

aux comptes rendus qu’il occupe et le statut qu’il a ainsi de facto de critique, être le seul valable<br />

quant au sens de l’ouvrage, et ce, bien évidemment, en ce qui concerne précisément le moment<br />

de l’énonciation de la citation qui ouvre le compte rendu, puisque l’auteur du Surmâle contredit<br />

celle-ci, en un certain sens, juste après, écrivant : « Essayons pourtant d’établir une théorie […] ».<br />

Si Jarry impose son propos, par cette citation, alors que c’est le propos de l’auteur qui<br />

semble, au travers de la citation, être seul à se faire jour, c’est parce que l’auteur de Messaline<br />

n’ignore pas que le passage cité fait figure d’hapax eu égard à l’ensemble de l’ouvrage et le restitue<br />

pourtant implicitement comme s’il n’était nullement tel.<br />

L’on peut aller jusqu’à considérer que Jarry cite ce fragment (mais sans erreur, rappelons-le)<br />

d’une façon telle que celui-ci s’oppose ouvertement au sens du propos de toute l’introduction, en<br />

somme d’une façon telle qu’il s’oppose au propos de son auteur : remarquons ainsi que ce n’est<br />

pas en tant que passage qu’il s’oppose à la parole de son auteur, mais en tant que passage mis en<br />

avant par Jarry dans son compte rendu (et, qui plus est, en son début, afin d’attirer fortement<br />

l’attention du lecteur sur son sens), et ainsi désigné implicitement comme étant en tout point<br />

révélateur de l’ensemble de l’ouvrage. Ce faisant, Jarry semble s’attacher à répondre à son<br />

commandement érigé dans le premier Almanach en 1899 : « notre parole s’élèvera […] en sa vérité<br />

absolue, sans discussion. 1 »<br />

L’on peut penser que Jarry, par ce faire, cherche à interroger la fonction de critique (et ainsi<br />

la légitimité de celle-ci), en nous montrant qu’une citation n’est jamais pourvue de neutralité. Elle<br />

ne fait jamais sens quant à un propos global, quant à une visée générale, quant aux lignes<br />

directrices traversant un ouvrage ; elle est toujours partielle et parcellaire.<br />

1 OC I, p. 536.<br />

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