30.06.2013 Views

thèse

thèse

thèse

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

par la douleur, quand elle s’oppose à elle, – en faisant le « mal ». En modifiant les courants de la<br />

Loi, l’Âme engendre des forces bénéficientes [sic] ou sataniques qui, après avoir ondulé dans<br />

l’univers jusqu’à la barrière que la Loi y a placée, reviennent à leur point de départ, – l’homme 1 » ;<br />

« […] la Loi divine ne permet jamais que l’innocence puisse souffrir de l’erreur des âmes en<br />

évolution ; elle ne laisse frapper que les coupables, – que leurs fautes soient connues ou<br />

inconnues, de la vie présente ou des vies passées. 2 »<br />

Sur la conception chez Jarry, issue de sa lecture intense et féconde de Lautréamont, du mal<br />

comme autre forme de pureté, voir notamment Helga Finter, « Ubu hétérologue : remarques sur<br />

Jarry, la littérature et le mal », L’Étoile-Absinthe, n os 25-28, « Jarry et Cie », Société des amis<br />

d’Alfred Jarry, 1985, p. 31-42.<br />

Jarry défendait l’idée, héritée de sa lecture du Dogme et rituel de la haute magie (Alcan, 1894)<br />

d’Eliphas Lévi (Alphonse Constant), comme quoi « les contraires sont identiques 3 » (« Être et vivre »),<br />

idée qui le poussa à être attiré par la Gnose, et à rendre compte en des termes élogieux de L’Arbre<br />

Gnostique (ainsi que du Catéchisme expliqué de l’Église gnostique) dans La Revue blanche du 15 novembre<br />

1900, ouvrage au sein duquel est décrété que « [l]e royaume du Bien et le royaume du Mal se<br />

copénètrent sur leurs confins. 4 »<br />

En outre ce principe d’équivalence énoncé nie-t-il de fait toute reconnaissance du principe de<br />

justice sur quoi se construit la magistrature (instance contre laquelle Jarry ne cessera de lutter, y<br />

compris lorsqu’elle s’affirmera, à travers la figure populaire du « bon juge » Magnaud, soucieuse<br />

de rétablir un principe d’équité dont elle est le plus souvent, aux yeux de ses détracteurs et aux<br />

yeux de Magnaud lui-même, dépourvue : ainsi l’attaque de Jarry s’exprime-t-elle dans tous les cas,<br />

quel que soit le visage, dur ou conciliant, qu’arbore la justice, celle-ci étant combattue comme<br />

abstraction et non comme structure humaine soumise aux évolutions – fondées sur le cours<br />

historique lequel implique, de fait, un certain nombre de réformes – et éminemment variable,<br />

même si ce n’est que dans la nuance, suivant la personnalité des juges), et ce doublement.<br />

En premier lieu, toute possibilité de jugement est supprimée car il n’est plus possible de<br />

distinguer, à l’aune d’une moralité sinon absente du moins n’étant plus criterium d’appréciation et<br />

de vérité (puisqu’un acte n’étant plus bon ou mauvais en soi, tous les jugements de valeur, toutes<br />

les appréciations morales se valent), les actes répréhensibles de ceux qui ne le sont pas.<br />

Et en outre le criminel ne peut-il plus être jugé s’il n’est pas conscient de cette distinction, et<br />

ainsi n’a pas fondé son acte sur une transgression de la norme, ne donnant cours qu’à une<br />

1<br />

Dr Th. Pascal, op. cit., p. 80-81.<br />

2<br />

Id., p. 70.<br />

3<br />

OC I, p. 342.<br />

4<br />

Léonce Synésius (Fabre des Essarts), L’arbre Gnostique, Chamuel, 1889, p. 15.<br />

610

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!