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Cette ferveur, si elle reflétait un enthousiasme hyperbolique de la gente littéraire pour le renouveau<br />

oriental manifesté avec superbe par l’effort de Mardrus, n’était pas le fait de l’intelligentsia regardant souvent<br />

(notamment dans la Revue critique d’histoire et de littérature) avec une perplexité corrosive et circonstanciée cette<br />

entreprise de traduction jugée par trop libre et libérée.<br />

Elle n’était pas non plus le fait de toutes les petites revues. Remarquons que dans Le Mercure de France<br />

Rachilde rend compte avec la plus extrême ténuité et désinvolture des volumes, et sans continuité.<br />

5. Jarry considère, ainsi que la plupart de ses contemporains 1 , l’effort de Mardrus comme une<br />

façon toute archéologique de faire affleurer un passé oriental jusque-là passé inaperçu.<br />

Néanmoins, ce passé n’est lui en rien une archéologie : il est vivant, vivace. Aussi Jarry<br />

définit-il Mardrus dans la lettre qu’il lui adresse le 3 avril 1900 comme « notre Christophe Colomb<br />

de littératures inexplorées. 2 »<br />

Les rédacteurs rendant compte de la traduction de ce docteur mettront presque toujours<br />

l’accent sur la nouveauté extrême que constitue cette découverte, non seulement parce qu’il s’agit<br />

de la levée d’un voile posé sur tout un pan du passé (littéraire et culturel) concernant un pan<br />

géographique (l’orient) correspondant au passé de l’humanité (il s’agit en somme d’un passé<br />

double) mais aussi parce que cette parole que les exégètes peinent à situer alors dans la<br />

chronologie, par conséquent demeurant par défaut quelque peu immémoriale, est paradoxalement<br />

(puisque cela transparaît à travers l’effort de traduction proclamée uniquement « littérale » de<br />

Mardrus) pleinement ancrée dans la modernité.<br />

Et ce d’une part en développant précisément avec force et suivant une redondance<br />

remarquable des thématiques dont la modernité se nourrit pleinement au travers de sa littérature<br />

et qui caractérisent ce que d’aucuns ont nommé le Décadentisme ou la Décadence<br />

(l’omniprésence de la mort sous forme de châtiments, de tortures… ; le goût développé pour<br />

l’hyperbole exprimé au travers du renouvellement des excès en tous genres mais aussi du choix<br />

d’un vocabulaire rare et savant ; l’aspiration à une écriture modern’style ; la quête du raffinement<br />

sous toutes ses formes ; la représentation du « nègre » comme l’être en proie aux plus vils<br />

instincts ; celle de la femme comme l’être inassouvi par essence en prise constamment avec le<br />

désir sexuel et comme, notamment, une Circé ayant pouvoir sur les hommes de les transformer<br />

en bêtes ; l’attrait pour le mysticisme, le magisme, l’alchimie etc.).<br />

1 Voir Album Mille et une nuits, iconographie choisie et commentée par Margaret Sironval,<br />

Gallimard, collection Bibliothèque de la Pléiade, 2005<br />

2 OC III, p. 545.<br />

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