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nommer Edouard Smith. […] Vers trois heures du matin, un bruit léger réveilla Mme Kolb, qui,<br />

se mettant sur son séant, tourna un bouton et alluma une ampoule électrique. À peine la lumière<br />

avait-elle jailli qu’un homme se dressait près du lit, le visage dissimulé sous un léger voile noir, et à<br />

plusieurs reprises frappait […] ».<br />

L’agresseur veut d’autant mieux respecter son « incognito » qu’il gardait sur lui (Jarry ne<br />

pouvait que songer à ce trait) « […] une pince à champagne destinée à couper les fils des<br />

sonneries et des lumières électriques dans les appartements, opération à laquelle il allait se livrer<br />

lorsque sa victime se réveilla […] », ainsi que le rapporte (notamment) L’Echo de Paris du 14 avril<br />

1901.<br />

En outre, l’identification avec le marchand de sable est d’autant plus possible que le visage de<br />

Gilmour est alors masqué, comme nous l’avons déjà évoqué (Jarry décrit implicitement ce<br />

masque par la formulation « son incognito »), détail que les différents quotidiens relatent.<br />

Le Matin du 14 avril 1901 : « [La victime] raconta la scène du crime, ajoutant que son assassin<br />

avait sur le visage un voile noir lorsqu’il l’avait frappée pour la première fois. »<br />

L’Écho de Paris, le même jour : « On a retrouvé sous le piano le voile épais de crèpe [sic] noir<br />

dont il s’était caché le visage afin de n’être pas reconnu le cas échéant […] ».<br />

Le Petit Parisien, toujours le même jour : « derrière le piano, le voile de crêpe noir qui<br />

masquait le visage de Smith […] ».<br />

Le visage de l’agresseur lui-même s’apparente à un masque puisque L’Écho de Paris, dans un<br />

article paru le 14 avril 1901 qui a inspiré Jarry avec certitude, décrit que l’ « assassin » est un<br />

« homme » au « masque impassible ». L’agresseur devient ainsi un vide sémantique qu’il s’agit de<br />

combler, une présence sans référent possible dont il s’agit de deviner l’identité, perceptible par le<br />

biais de la présence du sable contenu dans le sac.<br />

Cette présence n’est en effet pas dissimulée au sein du sac mais elle demeure véritablement<br />

visible, puisque, comme nous l’apprend L’Écho de Paris : « […] sous un autre meuble gisait le gros<br />

boudin de sable pour assommer sans tuer, mais par la force du coup la toile s’était crevée et le<br />

sable s’était répandu sur le tapis. »<br />

L’agresseur est véritablement « L’Homme au sable » puisqu’il jette du sable sur la victime,<br />

même involontairement (le sac étant malencontreusement fendu), lors de la période au cours de<br />

laquelle celle-ci dort habituellement.<br />

Or, comme l’écrit Hoffmann dans ses Contes nocturnes : « Il n’y a pas d’Homme au Sable, […]<br />

répondit [l]a mère. Lorsque je dis : L’Homme au Sable vient, cela signifie simplement que vous<br />

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