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— Quelle identité pour l’homme ?<br />

Cette assimilation entre « Dieu » et « homme », fût-il « anarchiste », demeure néanmoins<br />

également problématique pour l’auteur de Messaline, comme en témoigne La Dragonne : « Et<br />

maintenant Dieu n’est pas, et l’homme est l’être humain, dit Sacqueville. 1 »<br />

Mais cette dernière expression est tout sauf une tautologie. « [L]’être humain » n’est<br />

nullement, pour Jarry, une formulation allant de soi, l’auteur du Surmâle ne se satisfaisant pas de la<br />

définition alors universellement répandue stipulant que l’homme est un « [a]nimal doué de raison,<br />

qui appartient à la classe des mammifères, mais qui se distingue de tous les autres animaux par<br />

l’excellence de son organisation intellectuelle […] 2 » et n’y accordant, en ce qui concerne du<br />

moins la seconde partie, aucune importance, comme le prouve son éloge de l’ouvrage de<br />

Maréchal intitulé Supériorité des animaux sur l’homme.<br />

Dans La ballade du vieux marin, « en sept parties, d’après Samuel Taylor Coleridge », Jarry fait<br />

parler ainsi l’ « Ermite » : « Réponds-moi quelle espèce, / Quelle espèce d’homme es-tu ? 3 ». Et il<br />

radicalise encore ce questionnement des années plus tard dans Le Surmâle, écrivant : « Qui es-tu,<br />

être humain ? 4 »<br />

Cette question a toute son importance puisque Jarry l’utilise comme titre du chapitre X 5 de<br />

ce « roman moderne ». L’auteur de Messaline, s’il fait possiblement allusion à l’« Histoire du<br />

deuxième Saâlouk » comprise dans l’« Histoire du portefaix avec les jeunes filles » présente au sein<br />

du Livre des Mille Nuits et Une Nuit dans la traduction de Mardrus : « Alors elle me regarda et me<br />

dit : « Es-tu un être humain ou un genni ? » Je lui répondis : « Un être humain » 6 », s’inspire aussi<br />

précisément des Chants de Maldoror : « Qui es-tu, donc, toi, être pusillanime ? 7 », et le renversement<br />

qu’il fait opérer à la formulation de Lautréamont fait sens.<br />

Le terme « pusillanime » signifiant « [qui] a une âme faible et timide […] 8 », Jarry retient<br />

uniquement la première partie de la définition du GDU : « qui a une âme », méthode consistant à<br />

ériger un détail en totalité qu’il emploie à diverses reprises dans ses chroniques, et qu’il utilise<br />

également quant au GDU (ce n’est ainsi pas un cas isolé) en ce qui concerne l’étymologie de<br />

« nature » qu’il évoque dans son compte rendu de Prêtres et moines non conformistes en amour.<br />

1 OC III, p. 481.<br />

2 GDU, tome 9, p. 353.<br />

3 OC II, p. 24.<br />

4 Id., p. 252.<br />

5 Voir Id., p. 251.<br />

6 BL I, p. 62.<br />

7 Comte de Lautréamont, Les Chants de Maldoror, « chants I, II, III, IV, V, VI, frontispice de José<br />

Roy », L. Genonceaux éditeur, 1890, p. 279.<br />

8 GDU, tome 13, p. 432.<br />

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