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versions classiques ; à publier mes notes à ce sujet, je remplirais trois ou quatre numéros de la<br />

Revue, et cela sentirait vraiment trop mauvais. 1 »<br />

Mardrus a anticipé cette réaction puisqu’il écrit dans sa préface, signifiant ainsi implicitement<br />

que cette « grossièreté » ne saurait venir de lui : « L’Occident maniéré, pâli dans l’étouffoir des<br />

conventions verbales, peut-être simulera-t-il l’ahurissement à l’audition du franc langage –<br />

gazouillant et simple et sonore de tout le rire – de ces brunes filles saines, natives des tentes<br />

abolies 2 », ce que du reste la Revue critique d’histoire et de littérature concède : « […] il était inutile de<br />

respecter généreusement toutes les brutalités d’un sensualisme brûlé du soleil […] 3 ».<br />

30. Eliphas Lévi, évoquant Circé dans Dogme de la haute magie, sans raison notable, témoigne de ce<br />

fait, en creux, de l’attrait de la littérature fin-de-siècle pour cette figure : « Quelle est donc cette<br />

magicienne qui change ses adorateurs en pourceaux et dont les enchantements sont détruits dès<br />

qu’elle est soumise à l’amour ? C’est la courtisane antique, c’est la fille de marbre de tous les<br />

temps 4 ».<br />

En reliant de facto la figure de Circé à l’explicitation teintée fortement d’érotisme de Mardrus,<br />

du fait du fil chronologique du texte, Jarry renvoie possiblement à l’assimilation qui est faite entre<br />

Circé et Messaline, que résumera Félicien Champsaur lorsqu’il définira Circé dans Le Combat des<br />

sexes comme « la magicienne qui faisait boire aux compagnons d’Ulysse sa liqueur enchangée dans<br />

sa coupe intime et les transformait en pourceaux 5 ».<br />

Du reste cette liaison opérée entre Circé et Messaline naît-elle peut-on penser de la<br />

traduction de Mardrus puisque celui-ci écrit que « la reine Almanakh » est une « enchanteresse<br />

inassouvie […] 6 ».<br />

31. À l’inverse, Mardrus traduit (et il nous faut citer une grande partie du passage concerné afin<br />

de rendre perceptible ce qu’entend Jarry par « littéral[ité] » – voir la suite du compte rendu) :<br />

« Sache donc que cette ville s’appelle la Ville-des-Enchantements, et que celle qui règne ici<br />

s’appelle la reine Almanakh ! C’est une magicienne redoutable, une enchanteresse<br />

extraordinaire […] ! Or elle est sans cesse brûlée par le désir ! Et chaque fois qu’elle rencontre un<br />

étranger jeune, solide et beau qui débarque dans cette île, elle le séduit et se fait monter et copuler<br />

beaucoup de fois par lui, pendant quarante jours et quarante nuits. Or, comme au bout de ce<br />

1<br />

Revue critique d’histoire et de littérature, nouvelle série, tome 50, juillet-décembre 1900, p. 321.<br />

2<br />

BL I, p. 2.<br />

3<br />

Revue critique d’histoire et de littérature, nouvelle série, tome 49, janvier-juin 1900, p. 406.<br />

4<br />

Eliphas Lévi, Secrets de la magie, I, Dogme et rituel de la haute magie, Histoire de la magie, La clef des<br />

grands mystères, édition établie et présentée par Francis Lacassin, Robert Laffont, collection<br />

Bouquins, 2000, p. 125.<br />

5<br />

Félicien Champsaur, Le Combat des sexes, J. Ferenczi et fils, 1927, p. 185.<br />

6<br />

« Histoire de Fleur-de-grenade et de sourire-de-lune », BL II, p. 87.<br />

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