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Edouard Dubus déplore en conclusion de son compte rendu des Chansons d’Amant de<br />

Gustave Kahn (Lacomblez, Bruxelles) d’avoir seulement écrit une « trop courte note 1 ».<br />

En 1893, Charles Merki, rendant compte de Solness le Constructeur, « drame en trois actes » de<br />

Henrik Ibsen, traduit par Prozor (Savine), écrit une nouvelle fois au sujet de cet auteur : « Ce<br />

n’est […] pas en une note bibliographique que j’oserai parler […] d’une œuvre nouvelle d’Ibsen.<br />

Et je puis dire que, de nul artiste, je ne verrais cela sans regret. 2 »<br />

Cette récurrence notable dans l’aveu, en ce qui concerne Merki, affermie encore par le fait<br />

qu’elle ait trait au même auteur, fait hautement sens comme volonté de transférer un surplus de<br />

valeur sur le compte rendu en manifestant son insuffisance qui le fonde consubstantiellement en<br />

tant que compte rendu, ainsi que nous l’avons vu, lequel surplus de valeur sauve en quelque sorte<br />

le compte rendu de lui-même – puisque pourquoi continuer de rédiger semblables notes<br />

bibliographiques, si elles s’affirment ontologiquement indigentes, et qui plus est à propos du<br />

même auteur ?<br />

4. 4. 6. Aveu d’impuissance grandissant le texte commenté d’un surplus de valeur.<br />

Néanmoins, ce à quoi le commentateur ne semble jamais faire attention, c’est que justement<br />

cet aveu d’impuissance, de faiblesse, est ce qui grandit le texte commenté d’une valeur qu’il n’a<br />

pas de facto et que seul le compte rendu, dans son insuffisance même, lui confère, c’est-à-dire la<br />

valeur d’un texte au sens à ce point inépuisable, à la singularité à ce point affirmée qu’ils ne<br />

puissent être signifiés en peu de mots.<br />

Le sens et la valeur de l’ouvrage chroniqué débordent les possibilités didactiques et<br />

sémantiques d’un compte rendu, appellent la présence d’un (souvent long) article, tel est l’attrait<br />

que les commentateurs, dans leur aveu d’impuissance, donnent aux textes qu’ils étudient.<br />

Ainsi, il ne s’agit pas uniquement ici d’un constat qui fonde la dichotomie entre création et<br />

critique de laquelle la création sort toujours vainqueur, la critique n’étant prétendument qu’un<br />

succédané pâle de la création, puisqu’elle n’en donne à affleurer qu’une partie, mais – tout en<br />

proclamant évidemment ce topos, de façon tout à fait implicite – c’est le contraire qui se dit : c’est<br />

parce que le compte rendu ne peut véritablement dire le texte, et ainsi proprement en rendre<br />

compte (tout juste le critique peut-il saluer la parution d’un ouvrage, afin de le signaler à<br />

l’attention du lecteur, remercier son auteur de l’avoir écrit : aussi, c’est le seul fait pour le<br />

commentateur de prendre la parole au sujet d’un ouvrage, en l’arrachant au silence et à<br />

1 Le Mercure de France, n° 19-24, tome III, juillet-décembre 1891, p. 306.<br />

2 Le Mercure de France, n° 45-48, tome IX, septembre-décembre 1893, p. 84.<br />

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