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3. 5. Un désir prégnant de méthode : Jarry face aux thêmata.<br />

Le désir de méthode qui unit Jarry et Valéry est un même besoin de passer au crible d’un<br />

système qui serait inventé de toutes pièces par le sujet lui-même les réalités particulières du monde<br />

que la science (toute puissante en cette fin de dix-neuvième, objet d’effroi et/ou de fascination<br />

pour les artistes) nomme pleinement 1 suivant une classification qui est aussi système de valeurs, à la<br />

suite de découvertes toujours plus nombreuses (notamment dans le domaine de l’infinitésimal),<br />

de démonstrations toujours plus métastasiques. Des démonstrations placées sous l’égide du<br />

concept de vérité qui légitime le débordement scientifique : la science naît de la thémâta selon<br />

laquelle il y aurait une vérité, lisible quelque part, et l’idée de vérité (re)naît de l’avènement des<br />

raisonnements scientifiques.<br />

Les thêmata sont des suppositions préthéoriques concernant la nature (toute la philosophie<br />

pythagoricienne découle directement de ces intuitions, lesquelles trouvent naissance dans le fait<br />

qu’étant œuvre de Dieu, la nature est dans les fondatrices consciences nécessairement perfection<br />

et harmonie) : à savoir, par exemple, qu’elle présente une harmonie de type mathématique<br />

(thêmata développée par Jarry), qu’elle est composée d’unités fondamentales, qu’elle est<br />

mécaniquement agencée comme un mouvement d’horlogerie…<br />

Le développement des sciences sacre quelques-unes de ces thêmata (mais toujours avec de<br />

menues corrections).<br />

Ainsi, Bergson remarque, sous forme d’un soupir, que « l’univers tout entier finit par prendre<br />

la forme d’un mécanisme aux yeux d’une intelligence qui se représente idéalement la science<br />

achevée 2 ».<br />

Une autre thêmata est que les formes naturelles sont symétriques, intrinsèquement esthétiques.<br />

L’harmonie (comme la beauté) naît de la symétrie. Or, l’harmonie est preuve de vie car toute vie<br />

est intrinsèquement et extérieurement harmonie : « Lyres, cœurs ou potiches, ils sont vivants<br />

parce que longitudinalement symétriques 3 », écrit Jarry dans le second numéro de L’Ymagier de<br />

janvier 1895. En étant symétriques les uns par rapport aux autres, les oiseaux des Minutes (« si je<br />

m’étais attardé à écouter les quatre oiseaux symétriques 4 ») donnent à ressentir l’équilibre<br />

harmonieux dans lequel est plongé un monde aux résonances toutes pythagoriciennes. Les<br />

oiseaux n’inventent pas la beauté, ils retrouvent une place au sein du monde qui leur était<br />

1 En les définissant suivant un champ d’expérimentation qui va sans cesse du particulier au<br />

général, de détails en abstractions, et opère par rapprochements successifs.<br />

2 Henri Bergson, Les deux sources de la morale et de la religion, Presses universitaires de France,<br />

collection Quadrige, 1932, p. 171<br />

3 Bouquin, p. 207.<br />

4 Id., p. 45.<br />

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