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« Jarry ne se laisse pas lire 1 », jusque dans les comptes rendus qu’il publie. Comme le note<br />

François Caradec, « Alfred Jarry ne se situe pourtant ni au-dessus ni en dessous de ses<br />

contemporains, mais à côté, ou plutôt « en dehors ». 2 »<br />

Si le principe de syn<strong>thèse</strong> est, comme nous le constaterons en détail, tout au long de cette<br />

édition critique et commentée, déployé par Jarry lors de ses publications à La Revue blanche, quelle<br />

est la généalogie de celui-ci ?<br />

S’il irrigue son œuvre complète depuis ses commencements, s’agit-il néanmoins, année après<br />

année, du même principe ?<br />

2. 4. La syn<strong>thèse</strong> permise par le poème : maximalisation de l’infini sémantique.<br />

Le concept de « syn<strong>thèse</strong> » était alors très florissant dans le symbolisme finissant, comme l’a<br />

montré Julien Schuh 3 . Le principe esthétique de la syn<strong>thèse</strong> ne nourrissait pas seulement avec<br />

force l’avant-garde picturale. Il s’agissait pour les poètes comme Fargue ou Jarry à leurs débuts de<br />

permettre à leurs moindres textes critiques d’atteindre au statut de poème en prose, c’est-à-dire de<br />

présenter une concentration de sens qui soit telle que le déroulé de la phrase se tienne, au travers<br />

de l’intentionnalité de l’auteur, sans cesse dans une non explicitation de sa démarche, laissant la<br />

place à l’ambiguïté et à l’obscurité. Il s’agit en somme d’exprimer en un minimum de mots, de la<br />

façon la plus concentrée possible, le maximum de sens, – de maximiser les potentialités<br />

sémantiques par le recours alors constant à l’obscurité du fait notamment des complications<br />

syntaxiques et du choix d’un vocabulaire peu usité. En somme de répondre à la définition de la<br />

littérature qu’en donne George Steiner : « Je définirais la littérature […] comme la maximalisation<br />

de l’infini sémantique quant aux moyens formels de l’expression. 4 »<br />

Et plus spécifiquement à la définition que l’on peut donner de la poésie : si le recours au<br />

poème est constamment souhaité par Jarry jusque dans la sphère du compte rendu pendant la<br />

première période de sa critique, c’est précisément, peut-on penser, parce qu’il s’agit pour lui de<br />

répondre aux prérogatives du symbolisme et, plus spécifiquement, de se placer dans la lignée de<br />

Remy de Gourmont qui « rapproche parfois sa critique du poème en prose 5 ».<br />

1<br />

Julien Schuh, op. cit., p. 66.<br />

2<br />

François Caradec, À la recherche de Alfred Jarry, Seghers, collection « Insolites », cahier 12, 1974, p.<br />

8.<br />

3<br />

Voir notamment Julien Schuh, Alfred Jarry – Le Colin-Maillard cérébral, Étude sur les dispositifs de<br />

diffraction du sens, Thèse de doctorat, Paris IV, 2008.<br />

4<br />

George Steiner, Réelles présences, Les arts du sens, traduit de l’anglais par Michel R. de Pauw,<br />

Gallimard, collection Folio, 1991, p. 110.<br />

5<br />

NORDMANN, p. 169.<br />

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