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l’époque, Messaline offrant un contre-point, – non pas tant à travers l’évocation de la mort de<br />

Messaline qui renvoie à celle du Surmâle par le biais de l’appellation « monstre d’acier 1 » qu’à<br />

travers celle du suicide (ordonné) de « l’Asiatique » au chapitre V intitulé « Le père du Phénix » de<br />

la première partie –, aux Contes de la décadence romaine de Richepin que Jarry a lus et appréciés,<br />

comme en témoigne sa lettre adressée à Rachilde du 14 novembre 1898 2 .<br />

Au sein des Contes de la décadence romaine, l’on peut lire : « La salle de bains où j’écris ceci est<br />

pavée d’une mosaïque due au génie de Phidippidès, et les quatre statues qui en ornent les angles<br />

passent pour les quatre plus admirables qui soient à Rome. Un chœur de danseurs et de<br />

danseuses au corps parfait et nu va tout à l’heure, sur cette mosaïque, mimer le triomphe de<br />

Vénus en y effeuillant des roses, des violettes et des lis, tandis que des aulètes, des citharistes et<br />

des joueurs de cor, tous aussi de corps parfait et nu, accompagneront de leur mélodie la<br />

récitation, faite par mon mignon Mnesilochos, de l’hymne grec à Phoibos Appolôn le Musagète,<br />

au rythme des éventails en queue de paon soufflant une haleine fraîche et safranée. Et, cependant,<br />

moi, Cornelius Aurelianus Merula, dans ma baignoire de marbre pentélique, je m’ouvrirai les<br />

veines au moyen d’un petit ciseau en or incrusté de pierreries, et peu à peu et sans souffrir, parmi<br />

les parfums exquis, les musiques suaves, les vers aux sublimes images, les visions éblouissantes, le<br />

souvenir de tout ce que j’ai chéri, l’orgueil d’être le suprême représentant de l’amour pour le beau,<br />

et la consolation d’emporter avec moi le secret de cet amour, ma vie s’écoulant en un tiède lait de<br />

pourpre où agonisera ma mort délicieuse, très doucement je m’en irai. 3 »<br />

Dans Messaline cette fois, il est écrit : « Et sa recommandation finale et très calme fut<br />

qu’aussitôt son corps aux soins de la flamme, esclaves et femmes l’abandonnassent sans plus<br />

troubler le repos des bois, et que le dernier qui ferait désert le parc emportât le testament<br />

indéchiffrable, sauf à ses proches d’adoption, et son seul explicite codicille, la clé de la porte des<br />

jardins, qu’il offrirait à l’impératrice. Alors, sur son lit de sieste, il enfonça obliquement le rasoir<br />

dans le côté de son cou et commença, soulevé sur son séant et la gorge raidie, de balancer de<br />

droite et de gauche la nudité de son crâne et la transparence de sa face qui laissait déjà voir au-<br />

dedans la mort, imitant un ver qui monte pour filer. Et la soie ténue du sang de l’artère, par ce<br />

mouvement de navette, tissa sur le corps subitement sénile et les coussins blancs comme une<br />

barbe son linceul de pourpre 4 ».<br />

1 OC II, p. 138.<br />

2 Voir OC I, p. 1069.<br />

3 Jean Richepin, Contes de la décadence romaine, Bibliothèque-Charpentier, Fasquelle, 1898, p. 280-<br />

281.<br />

4 OC II, p. 101.<br />

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