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Avec le livre suivant, César-Antechrist, Jarry avait l’intention de faire en sorte qu’en son sein<br />

« tout y s[oit] par blason 1 », répondant à un souci de rendre le langage figuratif au-delà de tout<br />

emprisonnement sémantique possible mais également, paradoxalement, de tout accaparement par<br />

le domaine pictural appartenant au figuratif, la figuration devant apparaître suivant l’aporie des<br />

signes mathématiques, comme cela est perceptible dans les gravures de Jarry présentes dans César-<br />

Antechrist mais aussi dans Les Minutes où les lignes se dessinent suivant la forme de lettres<br />

possibles, avec une prédominance pour la lettre X, symbole du mystère, du sens tu, qu’il s’agit<br />

d’éveiller, Jarry problématisant la vision de l’image comme s’il s’agissait d’un texte elliptique ou<br />

cryptique dont il s’agirait de dérouler la signification enclose, incluse – souci qui appartient<br />

pleinement à cette époque, que synthétisera de façon exemplaire Camille Mauclair dans Le Soleil<br />

des Morts (Ollendorff, 1898), roman qui à bien des égards s’affirme comme la syn<strong>thèse</strong> des<br />

aspirations protéiformes qui forment néanmoins l’unité somme toute relativement floue (étant<br />

faite, à bien des égards, de la coexistence des extrêmes) de cette fin-de-siècle : « J’ai parfois rêvé<br />

d’une langue qui serait, par l’arrangement de son texte même, un dessin ; tenez, elle pourrait être<br />

en beau ce que sont bêtement les « mots en losange » et les rébus des journaux. Son dessin, bien<br />

entendu, n’aurait rien du dessin figuratif qui est le propre de la peinture. Ce serait un dessin<br />

élémental, si je puis dire. 2 »<br />

2. 2. Ouverture que renferme le dessin.<br />

Aussi le dessin doit-il, à cette époque, auprès de la communauté des auteurs dont Jarry fait<br />

partie, être perçu comme quelque chose d’indéfinissable autrement que par une indéfinition<br />

fondamentale, presque ontologique, comme quelque chose en somme d’extrêmement ouvert.<br />

Ainsi s’agit-il à notre sens d’ouvrir la définition qu’en donne Salah Stétié, qui nous paraît,<br />

bien qu’indispensable, par trop restreinte, celui-ci notant que le dessin est « une présence<br />

autonome identifiable et comme cernée par une définition » et ajoutant aussitôt : « Cette<br />

définition se doit d’être, pour que l’objet fût reconnu, la plus simple et la plus claire possible 3 ». La<br />

définition du dessin pour les symbolistes serait au contraire, en quelque sorte, son imprécision<br />

fondamentale suivant laquelle il peut toujours se muer en différentes modalités de langage<br />

possibles (car il s’agit bien, toujours, de signifier – l’abstraction, ce cas limite, signifiant également,<br />

1<br />

Propos cité par Noël Arnaud, Alfred Jarry, d’Ubu roi au Docteur Faustroll, La Table Ronde, 1974, p.<br />

123.<br />

2<br />

Romans Fin-de-Siècle, 1890-1900, textes établis, présentés et annotés par Guy Ducrey, Robert<br />

Laffont, collection Bouquins, p. 914.<br />

3<br />

Salah Stétié, « Linéarité de Mallarmé », Dir. Bertrand Marchal et Jean-Luc Steinmetz, Mallarmé ou<br />

l’obscurité lumineuse, Hermann, collection Savoir : lettres, 1999, p. 173-174.<br />

984

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