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l’originalité de son auteur 1 . Elles sont une mise en bouche spéciale. « La bibliographie [...] ne<br />

pourrait-elle pas se composer d’apéritifs extraits ? 2 », s’interroge Le Mercure de France en 1893 à<br />

propos de Élégies Royales de Dauphin Meunier (Librairie de l’Art Indépendant).<br />

Cependant, les citations donnent aussi l’illusion, quand elles ne servent pas l’ironie, de retenir<br />

d’un ouvrage ce qui mérite d’en être retenu. « Peut-être pourrait-on citer [...] mais vraiment tout<br />

cela est bien quelconque 3 », écrit Merki à propos de Feuilles au Vent de F. de Loubens. Louis<br />

Dumur constate ainsi dans Le Mercure de France en 1892, au sujet de l’ouvrage d’Achille Grisard<br />

intitulé De Branche en Branche : « Mais quand, dans tout un volume, il n’y a qu’une pièce à citer... on<br />

ne la cite pas. 4 »<br />

C’est notamment pour cette raison, peut-on penser, que lorsqu’il doit révéler quelque chose<br />

de la beauté d’un ouvrage, le critique hésite toujours quelque peu avant de citer, car « quelques<br />

phrases [...] perdront beaucoup à être détachées de l’ensemble 5 ». Comme le constate Camille<br />

Mauclair à propos de Les Chansons de Bilitis, « traduites du grec par Pierre Louys » [sic] (Librairie<br />

de l’Art Indépendant) dans Le Mercure de France en 1895 : « Il faudrait citer toute cette période. 6 »<br />

En utilisant la citation comme une arme, et cela de deux manières différentes, ainsi que nous<br />

l’avons vu, il s’agit bien sûr pour Jarry en premier lieu de ridiculiser Sarcey dans sa posture<br />

d’homme incarnant le bon goût en matière de théâtre, et ainsi de le discréditer d’autant plus qu’en<br />

étant critique de profession il revêt de facto une certaine autorité qu’il perd de ce fait, du moins<br />

dans une certaine mesure – devenant, par certains aspects, ridicule (en ce qui concerne son<br />

évocation d’Hamlet principalement, mais aussi de Racine, telles que restituées par Jarry), et<br />

s’affirmant pauvre en langue, étant donné l’énorme erreur qui semble être la sienne, son<br />

incompétence dans la langue même devenant signe d’incapacité intellectuelle (outre le fait qu’il est<br />

accusé de pactiser avec la foule, Sarcey étant critique de profession).<br />

En second lieu s’agit-il pour Jarry de montrer que Sarcey n’est qu’un journaliste, nullement<br />

un écrivain – reproche implicite, qui se comprend lorsque l’on contextualise cette arme de<br />

critique (qu’est en l’occurrence la citation) au sein des petites revues, et tout particulièrement,<br />

comme nous l’avons analysé, au sein du Mercure de France.<br />

1<br />

Ainsi, Rachilde, rendant compte de L’Intruse d’Eugène Faivre (Savine) en 1891, écrit : « Le style<br />

n’est certes pas banal, car il étincelle de comparaisons extraordinaires : « Le désir chez une fille<br />

honnête est comme le duvet de la reine-claude… etc…, etc… » » (Le Mercure de France, n° 19-24,<br />

tome III, juillet-décembre 1891, p. 367).<br />

2<br />

Le Mercure de France, n° 37-40, tome VII, janvier-avril 1893, p. 377.<br />

3<br />

Id., p. 275.<br />

4<br />

Le Mercure de France, n° 29-32, tome V, mai-août 1892, p. 275.<br />

5<br />

Le Mercure de France, n° 33-36, tome VI, septembre-décembre 1892, p. 76.<br />

6<br />

Le Mercure de France, n° 64-66, tome XIV, avril-juin 1895, p. 105.<br />

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