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En réalité, il n’est pas possible d’affirmer que Dubois-Desaulle est impartial dans son compte<br />

rendu puisque de nombreux passages de sa préface (qui constitue l’essentiel de son propos, le<br />

corps du livre étant constitué d’archives) apparaissent, n’étant pas marqués au moyen des<br />

guillemets, et ainsi étant bien issus de la parole de l’auteur (celle-ci fût-il ironique, et le serait-elle,<br />

ce serait très surprenant, étant donné la volonté très sensible de Dubois-Desaulle d’énoncer un<br />

discours précis se voulant scientifique – voir la note 27), comme exprimant une certaine violence,<br />

et même une violence certaine, contre cette forme de sexualité.<br />

Il écrit ainsi notamment (nous soulignons les passages les plus révélateurs) : « Ce qu’on<br />

appelle […] le vice […] vient des sombres profondeurs de la préhistoire et suit l’humanité […]<br />

comme une bête attachée aux mauvais relents de l’animalité humaine 1 » ; « Que la déviation soit innée ou<br />

acquise, qu’elle relève de la maladie ou du vice […]. L’individu contaminé en contaminera d’autres 2 » ; « La<br />

perversion (maladie) est du domaine de la science ; la perversité (vice) rentre dans celui de la sociologie<br />

et de la philosophie. Dans la perversité, des facteurs sociaux entrent en jeu. D’un côté la luxure, la<br />

dépravation produites par l’excès des plaisirs […] – De l’autre ; la nécessité, la peur, la misère. Les uns<br />

pédérastes par goût, les autres par intérêt 3 » ; « […] sans vouloir tenir compte ni des causes qui<br />

engendrent la dépravation, ni de ses effets néfastes sur l’avenir d’une race, beaucoup s’imaginent que ce<br />

mal sera diminué si les tares restent cachées, si « le scandale » est évité. On ne guérit pas les plaies<br />

sociales en les couvrant d’un drap mortuaire mais en y fouillant d’un geste sûr, d’une lame acérée, sans<br />

craintes et sans faiblesses. 4 » Cette dernière métaphore est la plus propre à exprimer la violence<br />

contenue dans le propos de Dubois-Desaulle.<br />

Aussi, les dernières lignes de sa préface, que cite Jarry, sont, d’une certaine manière, en<br />

contradiction avec le sens de celle-ci ; remarquons que Jarry ne pouvait manquer d’avoir<br />

connaissance de ce fait, puisqu’il cite d’autres passages du texte introductif.<br />

— Une ironie singulière.<br />

De ce fait, en citant le passage de la préface qui contredit le plus l’ensemble de celle-ci, Jarry<br />

affirme une ironie « froide, une ironie d’autant plus forte qu’elle semble s’ignorer 5 », pour<br />

reprendre l’expression d’un compte rendu anonyme de Les Bons Parents d’Hubert Krains inséré<br />

dans Le Mercure de France en 1891.<br />

1 Id., p. I.<br />

2 Id., p. VI.<br />

3 Id., p. VIII.<br />

4 Id., p. II.<br />

5 Le Mercure de France, n° 19-24, tome III, juillet-décembre 1891, p. 122.<br />

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