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ardus : ainsi chronique-t-il dans La Revue blanche du 1 er janvier 1901 les Éléments d’économie politique<br />

pure de Léon Walras, livre strictement incompréhensible pour qui n’est pas mathématicien.<br />

Face à de telles difficultés, Jarry affiche calmement son érudition. Mais celle-ci, le plus<br />

souvent, est feinte, Jarry puisant ses assertions critiques dans les ouvrages qu’il commente en les<br />

maquillant sous la forme d’un propos exégétique qui serait sien (comme c’est le cas dans son<br />

compte rendu de La Psychologie de l’amour de Gaston Danville paru dans La Revue blanche du 1 er mars<br />

1903 1 ), ou carrément fallacieuse, comme c’est le cas dans son compte rendu du Golf en Angleterre et<br />

les Golf-Clubs de France de F.-W. Mariassy paru dans La Revue blanche du 1 er décembre 1900 2 .<br />

C’est comme si Jarry, dans ce dernier compte rendu, rectifiant avec fracas un élément du<br />

texte par une erreur, s’attachait à dire que le savoir ne peut être pris au sérieux. C’est comme si<br />

Jarry proclamait que le savoir est élément de fiction, ce qu’il montre du reste exemplairement, à la<br />

même époque, avec Le Surmâle.<br />

En outre, il ne s’agit pas pour l’auteur du Surmâle de donner un avis sur tel ou tel livre, ou de<br />

mettre en perspective son apport, et de défendre ou de contester la légitimité de celui-ci dans le<br />

champ précis du savoir au sein duquel l’ouvrage s’enracine. Il s’agit en premier lieu pour Jarry,<br />

grâce à l’opportunité que lui offre Fénéon, grâce au rôle de critique littéraire en somme, de<br />

découvrir les livres vers lesquels sa curiosité le pousse. Inlassablement.<br />

Le compte rendu paraît à la limite secondaire, et répond à l’impératif financier en même<br />

temps qu’il permet à l’auteur de Messaline d’élaborer, à travers lui, invisiblement une théorie qui lui<br />

tient à cœur concernant tout à la fois le rôle (et les impasses) de la critique et l’identité que revêt<br />

de facto toute présence auctoriale.<br />

Si l’on est sûr que Jarry choisit les livres dont il rend compte, c’est parce que tous répondent,<br />

d’une façon ou d’une autre, au caractère protéiforme de son goût, tel qu’il peut se lire avec netteté<br />

dans son œuvre complète, mais aussi dans sa correspondance, dans les témoignages que ses<br />

contemporains ont laissé de lui etc.<br />

En outre, tous les livres chroniqués par Jarry qui ne répondent pas directement aux<br />

modalités de son goût sont reliés, d’une façon ou d’une autre, au Mercure de France.<br />

Si l’on assiste au déploiement de nombreuses critiques d’amitié, c’est parce que Jarry cherche<br />

avidement et continument à tisser une filiation avec cette petite revue vers laquelle il n’a cessé de<br />

se diriger, et qui a toujours été, de par les « mardis » de Rachilde 3 , de par le Phalanstère 4 etc., sa<br />

1 Voir p. 723-744 de cette édition critique et commentée.<br />

2 Voir p. 773, 784-785 de cette édition critique et commentée.<br />

3 Voir Alfred Jarry, Œuvres complètes, sous la direction d’Henri Béhar, tome I, op. cit., p. 12.<br />

4 Jarry fut « membre permanent du Phalanstère, cercle de vacanciers fondé en 1898 par le<br />

directeur du Mercure de France et deux des plus fidèles amis de Jarry [et membres importants du<br />

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