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entamé l’optimisme philosophique de la première moitié du siècle. 1 » S’affirme alors avec force<br />

« le sentiment d’unicité de l’être individuel et surtout ce qui l’exalte (dans l’émotion intime,<br />

artistique, liturgique…). L’intimité, l’intensité du « moi » l’emportent sur le sens de l’Histoire 2 ».<br />

Or, toute l’œuvre de Jarry participe de cette exaltation du « moi », au mépris de toutes les<br />

contingences, jusque dans l’ensemble de ses textes critiques apparemment très hétérogène, mais<br />

pas si l’on prend en considération que se manifeste en creux, dans cet ensemble, l’éloge du<br />

Même, puisqu’il s’agit toujours pour Jarry de donner voix à ses propres goûts, fussent-ils<br />

protéiformes.<br />

Ce désintérêt face à l’Histoire s’exprime principalement par un grand mépris pour la vérité<br />

historique, laquelle est indissociable de la vérité scientifique, ainsi que cela a été explicité.<br />

Sur ce mépris, que rend parfaitement apparent la formulation « qui eût été perdu pour<br />

l’histoire si M. Haringus ne l’eût […] inventé » présente au sein de ce compte rendu, voir la<br />

réponse que Jarry donna à l’enquête sur « [l]’alsace-lorraine et l’état actuel des esprits » publiée<br />

dans Le Mercure de France de décembre 1897 3 et surtout « La Vérité bouffe » qui paraît dans La<br />

Plume le 1 er juin 1903.<br />

— Conception jarryque de l’Histoire : un individu supérieur à une foule.<br />

Mais il ne faut pas déduire de ce mépris affiché pour la vérité historique un désintérêt<br />

profond pour l’histoire, contrairement à ce qui semble de prime abord évident. L’intérêt de Jarry<br />

pour l’histoire, s’il passe toujours par des détours livresques 4 (et ainsi par le détour de la fiction, ce<br />

qui montre à quel point l’Histoire pour l’auteur du Surmâle est inéluctablement reliée à la<br />

littérature – ce que montre parfaitement son compte rendu de L’Agonie d’Albion de Demolder),<br />

est perceptible notamment au travers de l’écriture de Messaline ou encore de son compte rendu de<br />

L’Enfant d’Austerlitz de Paul Adam.<br />

À travers ce mépris pour la vérité historique (et à travers elle pour toutes formes de vérités<br />

qui puissent être rattachées à un discours de connaissance – en somme à un discours<br />

d’appropriation, de prise sur le monde) se lit une conception de l’histoire que Jarry partage avec<br />

de nombreux auteurs de sa génération, confiants dans la légitimité et la pertinence de la notion<br />

d’élite.<br />

1 Alphonse Germain, « Questions d’Occultisme et de Science psychique, Les Phénomènes<br />

Psychiques », La Plume, n° 281-304 bis, année 1901, Genève, Slatkine reprints, 1969, p. 306.<br />

2 Yasuko Eshima, Le Christ fin de siècle, Tusson, Du Lérot, 2002, p. 9. Voir aussi, à ce sujet, Histoire<br />

religieuse de la France contemporaine, Flammarion, 1965, p. 513 et sq.<br />

3 Voir OC I, p. 1030.<br />

4 Comme le montrent de façon exemplaire les sources de Messaline.<br />

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