30.06.2013 Views

thèse

thèse

thèse

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

en quantité innombrable, potentiellement dangereux, et ainsi propres à susciter la terreur dans<br />

l’imaginaire collectif.<br />

Le danger ne vient plus seulement de l’extérieur, mais de l’intérieur même du corps. « Des<br />

microbes en quantité innombrable vivent et pullulent dans la bouche de l’homme sain, les uns<br />

pour y séjourner, les autres pour descendre dans les bronches, l’estomac et l’intestin. Le tube<br />

digestif en est envahi, de telle sorte qu’on a pu le nommer, non sans raison, « le paradis des<br />

microbes […] Leur présence ne doit pas nous étonner, si l’on songe que chaque bouffée d’air<br />

inspiré, chaque gorgée de liquide, chaque bouchée de solide déglutie, laissent sur la muqueuse une<br />

partie des microbes qu’elles contiennent. 1 »<br />

Remarquons que si l’imaginaire collectif se cristallise sur l’aspect horrifique des microbes,<br />

c’est au mépris de certaines publications scientifiques contemporaines émanant de personnalités<br />

autorisées qui avancent qu’ils ne sont « nuisibles que quand ils sont dans une place qui ne leur<br />

convient pas 2 », mettant même implicitement en exergue leur aspect bienfaisant, au travers de<br />

l’énoncé de l’idée de leur légitimité et ainsi de leur nécessité quant à la vie du corps 3 .<br />

Comme le résume Alphonse Allais au sein du « [p]anneau allégorique » de « La science et la<br />

religion – enfin – marchent la main dans la main » dans Pour cause de fin de bail, une « effroyable<br />

publicité […] sévit sur [les microbes] depuis quelques années […] 4 ».<br />

— S’opposer à l’hygiénisme galopant.<br />

Ainsi, Jarry, de par l’énoncé d’une conception de l’eau qui se fait jour de façon extrêmement<br />

resserrée dans ce compte rendu 5 réagit-il évidemment en force contre l’hygiénisme galopant, en<br />

cette fin-de-siècle contaminée par la découverte microbienne.<br />

La façon qu’a l’hygiène de tout colorer de son empreinte, y compris ce qui ne concerne pas à<br />

proprement parler la médecine, est moquée implicitement par Jarry dans sa chronique « Le vaccin<br />

du soleil » parue dans Le Figaro le 3 août 1904 : « En attendant ce progrès de l’hygiène […] ». E.<br />

de Feuchtersleben va ainsi jusqu’à considérer l’existence d’une « [h]ygiène de l’âme » : par cette<br />

1<br />

Théophile David, Les Microbes de la bouche, « lettre-préface de M. L. Pasteur », F. Alcan, 1890,<br />

p. 1-2.<br />

2<br />

John Tyndall, Louis Pasteur, Les Microbes organisés, leur rôle dans la fermentation, la putréfaction et la<br />

contagion, « mémoires », Gauthier-Villars, 1878, p. 27.<br />

3<br />

Ibid.<br />

4<br />

Alphonse Allais, Œuvres anthumes [œuvres complètes, volume I], avant-propos, biographie et<br />

bibliographie par François Caradec, Robert Laffont, collection Bouquins, 1989, p. 871.<br />

5<br />

Voir Alfred Jarry, Gestes et opinions du docteur Faustroll pataphysicien, « roman néo-scientifique »,<br />

édition [établie et] annotée par une transcommission exceptionnelle du Cymbalum pataphysicum,<br />

[Sermiers], Cymbalum pataphysicum [Collège de Pataphysique], 1985, p. 107.<br />

876

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!