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lanche de se le procurer : son compte rendu n’a ainsi d’autre utilité que celle qui consiste à<br />

témoigner de son plaisir de lecture.<br />

Alors que lorsqu’il chronique les ouvrages de ses amis, il cherche ouvertement à leur<br />

permettre, de par le savant éloge qu’il déploie, d’accéder à un lectorat certain, ici, le compte rendu<br />

s’affirme comme aveu : par son biais, Jarry proclame son amour pour l’étranger, d’autant plus que<br />

cette caractéristique est immédiatement – et d’assourdissante façon – visible, étant donné le fait<br />

que le livre n’est pas traduit (voir la note 1) ; l’on peut imaginer que Jarry a choisi un livre non<br />

traduit justement à dessein.<br />

Et son compte rendu tout entier témoigne de sa volonté de faire vivre cette langue étrangère<br />

qu’il ne s’attache pas toujours à traduire (voir la note 14), ce qui lui aurait été pourtant aisé et<br />

serait demeuré éminemment logique, eu égard à son travail de critique – car cela aurait été certes<br />

plus commode pour le lecteur.<br />

Dans une moindre mesure, Jarry proclame, en outre (autre aveu), son habituelle apologie du<br />

Même (en choisissant un ouvrage qui dénote un souci de faire se rejoindre différentes formes<br />

d’expression artistique, souci qui a habité longtemps Jarry, comme en témoignent, faisant<br />

s’étreindre texte et gravures, ses premiers livres, fondateurs, en un certain sens, de toute son<br />

œuvre future – en ceci qu’ils mettent en place, comme c’est le cas pour chaque auteur, les<br />

obsessions et ambitions lui étant propres, quand bien même celles-ci évoluent obligatoirement au<br />

cours du temps, et ainsi au cours de l’œuvre).<br />

3. Remarquons que Jarry rend compte de plusieurs ouvrages publiés à compte d’auteur.<br />

Si cette pratique n’était nullement dépréciée à cette époque contrairement à aujourd’hui, elle<br />

était même, en un certain sens, valorisée pour les raisons explicitées dans le compte rendu paru<br />

en 1891 au sein du Mercure de France de Ce qui renaît toujours de Jean Carrère : « Voici un volume de<br />

vers dont la couverture ne se surcharge d’aucun nom d’éditeur, d’aucune adresse de librairie<br />

achalandée. L’auteur a pris le parti de se passer purement et simplement de cet intermédiaire<br />

inutile. C’est un acte de courage dont il faut lui savoir gré. 1 »<br />

Il s’agit pour l’écrivain, ce faisant, de s’opposer, ne serait-ce qu’indirectement, à la presse,<br />

comme l’écrit Camille Mauclair dans Le Soleil des Morts : « Comme il n’y a encore » que la presse<br />

« pour servir de truchement entre nous et le public, le meilleur parti qui nous reste est de ne rien<br />

lui confier et de tâcher de communiquer directement avec la foule. 2 »<br />

1 Le Mercure de France, n° 19-24, tome III, juillet-décembre 1891, p. 117.<br />

2 Romans Fin-de-Siècle, 1890-1900, textes établis, présentés et annotés par Guy Ducrey, Robert<br />

Laffont, collection « Bouquins », 1999, p. 899.<br />

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