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Or, la chronique « Ce que c’est que les ténèbres » a trait justement à… Rachilde : c’est de ce<br />

fait à dessein que Jarry emprunte implicitement l’une de ses formules à l’auteur de L’Animale en la<br />

déformant quelque peu, manière de clin d’œil et de manifeste, affirmant ainsi un fort cousinage<br />

avec elle dans la posture de critique qui, notamment, les relie tous deux : elle au Mercure de France<br />

et lui à La Revue blanche.<br />

2. 4. Systématisation de la louange pour ce qui est de la communauté d’auteurs à<br />

laquelle appartient Jarry.<br />

Rédiger des bibliographies « respectueusement 1 » consiste pour Jarry à « glorifier » les ouvrages.<br />

Dans sa lettre à Rachilde du 7 septembre 1907, l’auteur du Surmâle écrit ainsi : « nous classons La<br />

Chandelle verte, manuscrit tout entier typographié, puisque ce sont les anciennes « Spéculations », où<br />

l’on glorifie même vos in-18° 2 ».<br />

Ce terme, qui revient souvent sous la plume de Jarry, porte en lui un manifeste, s’affirmant<br />

comme la pierre de touche de l’esthétique de Jarry en ce qui concerne la critique littéraire<br />

(puisqu’au travers de l’acte de glorifier il faut, bien évidemment, lire une apologie du Même). Jarry<br />

écrit par exemple, dans son compte rendu du Cyclo-guide Miran illustré : « [...] nous ne pouvons que<br />

glorifier ce livre 3 », étant lui-même féru (et le mot est faible) de cyclisme.<br />

Il n’est ainsi pas possible comme le fait Edouard Graham dans Passages d’encre, échanges littéraires<br />

dans la bibliothèque Jean Bonna, envois, lettres et manuscrits autographes, 1850-1900 d’affirmer que « le<br />

verbe « glorifier » fait partie intégrante du vocabulaire ironiquement hyperbolique de Jarry 4 ».<br />

Nulle part dans sa correspondance ou dans son œuvre ce terme, certes très fort mais utilisé pour<br />

sa force – et revenant très souvent sous sa plume 5 , ce qui redouble encore presque<br />

sémantiquement sa force –, n’est utilisé par antiphrase. Il n’y a nulle trace d’ironie chez Jarry dans<br />

l’utilisation d’un tel verbe, qui est la raison d’être, telle qu’explicitée dans toute sa correspondance,<br />

1 Ibid.<br />

2 OC III, p. 691.<br />

3 OC II, p. 580.<br />

4 Edouard Graham, Passages d’encre, échanges littéraires dans la bibliothèque Jean Bonna, envois, lettres et<br />

manuscrits autographes, 1850-1900, Gallimard, 2008, p. 490.<br />

5 Voir par exemple, la lettre adressée à Claude Terrasse de fin janvier 1907 (OC III, p. 641). En<br />

outre, l’on peut citer, pour donner un ordre d’idée de cette récurrence, divers exemples. Il y a l’exdono<br />

de l’exemplaire que porte le numéro 2 d’Ubu Roi sur Japon : « Exemplaire construit pour<br />

glorifier Ubu-Lugné Poë ». En outre, l’auteur de Messaline invite Paul Valéry à la répétition d’une<br />

de ses pièces où le Père Ubu « sera glorifié ». De même, il offre d’Ubu Roi un « [e]xemplaire<br />

destiné à glorifier Charles-Henry Hirsch », ainsi que nous l’avons déjà mentionné. Un hollande,<br />

pour ne citer que ce dernier exemple, fut attribué à Tailhade en ces termes : « Monsieur Ubu<br />

glorifie Laurent Tailhade / bien amicalement / Alfred Jarry » (Edouard Graham, op. cit.).<br />

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