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universitaires » soit « supprimé », il cherche à ce que « [l]’interprétation s[oit], au degré le plus<br />

élevé possible, vécue. 1 »<br />

Cet usage détourné de la citation vise ainsi à faire du compte rendu une fenêtre ouverte sur<br />

l’œuvre, sans intermédiaire aucun, signifiante quant à son contenu et à l’intérêt qui s’en dégage,<br />

permettant à « l’acheteur d’un volume » de « prévoir », c’est-à-dire de « voir ce qu’il y a dedans,<br />

laquelle vision s’opère », d’ordinaire, « par la lecture 2 », ainsi que l’écrit Jarry dans sa chronique<br />

« La Tiare Écrite ».<br />

4. 5. 6. Pratique ludique du texte sériel.<br />

En déployant avec force une intertextualité silencieuse qui fasse que l’apparent commentaire<br />

soit en réalité, le plus souvent, un montage de citations déguisées, et en usant des guillemets pour<br />

un autre usage que celui qui consiste à marquer la citation, en somme par ce jeu insoupçonnable<br />

avec le lecteur, Jarry sembler poser constamment, et ce de façon ludique, « la question : qu’est-ce<br />

qu’un critique ? quelle est la position du lecteur ou du spectateur par rapport à l’œuvre dont il<br />

parle ? 3 »<br />

Mais à cette interrogation s’en ajoute immédiatement une autre. L’auteur de La Chandelle verte<br />

pousse le lecteur attentif qui ira découvrir les livres dont il parle à s’interroger sur l’identité de<br />

l’énonciateur.<br />

Jarry, avec ses comptes rendus, par le lent travail de mise à jour de l’intertextualité silencieuse<br />

qu’ils supposent, nous pousse à considérer la lecture autrement, à envisager dorénavant chacun<br />

de ses textes critiques (et, à travers eux, possiblement chaque page) comme un « espace ouvert,<br />

lieu géométrique du hors-texte et intertexte au sens fort » qui « n’est pas sans épaisseur. C’est une<br />

surface où les niveaux de discours s’écrasent et se fondent plutôt qu’ils ne se projettent<br />

proprement : ils s’empilent, ils se traversent, ils s’enchevêtrent. La page est stratifiée. Comment<br />

alors, pour le lecteur, se reconnaître et cheminer à travers son paysage tourmenté, y entendre<br />

quelque chose, ne pas s’ennuyer quand le parcours linéaire serait absolument monotone ? 4 »<br />

Jarry nous enseigne implicitement qu’il « faut s’introduire entre les strates du texte, les faire<br />

jouer, car le nivellement ne réduit pas vraiment les degrés de discours. Au contraire, ceux-ci<br />

1 George Steiner, op. cit., p. 30.<br />

2 Alfred Jarry, op. cit., p. 292.<br />

3 Patrick Besnier, « « S’il me plaît », sur deux critiques théâtrales de Jarry », L’Etoile-Absinthe,<br />

tournées 77-78, « Centenaire d’Ubu Roi », Communications du Colloque International (Hôtel de<br />

Massa, Société des Gens de Lettres / Université Paris III, Sorbonne Nouvelle, les 6 et 7<br />

décembre 1996) réunies par Paul Edwards, Société des amis d’Alfred Jarry, 1998, p. 5.<br />

4 Antoine Compagnon, op. cit., p. 388.<br />

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