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En outre ne fait-il jamais précisément allusion au contenu du compte rendu de Valéry dans sa<br />

bibliographie de l’ouvrage de Walras.<br />

3. 3. Deux auteurs apparemment dissemblables.<br />

Cette volonté émanant de Jarry de faire en sorte que son dialogue avec Valéry s’exprime de<br />

souterraine façon est frappante, et mérite d’être interrogée.<br />

En effet, rien ne semble, à premier regard, pouvoir rapprocher Jarry de Valéry. Ces deux<br />

auteurs semblent extrêmement dissemblables. Même si Jarry éprouvait une admiration mêlée à de<br />

l’amitié pour Valéry, on ne retrouve dans les écrits de Valéry nulle mention du nom ou de l’œuvre<br />

de Jarry 1 , exception faite dans sa correspondance : Valéry, lorsqu’il écrit à André Fontainas le 9<br />

février 1899 : « j’écris la vie du docteur Faustroll », parle peut-être du compte rendu qui paraîtra<br />

de lui de La Machine à explorer le temps de Wells dans Le Mercure de France de mai 1899, compte<br />

rendu aussi libre que l’est le « Commentaire » de Jarry, et qui est en réalité une spéculation sur le<br />

temps 2 .<br />

La nature de ce silence doit être interrogée, comme le fait Patrick Besnier 3 . Caviardage des<br />

ayant-droits de Valéry, refoulement de sa jeunesse (« [j]e me rappelle [...] de longues conversations<br />

avec Marcel Schwob 4 », écrit Valéry dans un compte rendu qui paraît en janvier 1898, Jarry<br />

passant à la trappe) d’un penseur de plus en plus sérieux, ou bien rejet vital d’un esprit se voulant<br />

pur, balayant toute influence trop visible, n’aimant pas « ce qu’il n’a pas inventé 5 » (Mélange), se<br />

détournant de tout élan de pensée systématique similaire au sien (il va puiser ses influences chez<br />

les physiciens et mathématiciens, ou chez les peintres, quasiment jamais chez les auteurs qui lui<br />

sont contemporains) ? Impossible de répondre en l’état actuel des découvertes.<br />

Et si Valéry parlait de Jarry sans le nommer ? C’est en effet plausible, si l’on considère le fait<br />

que Valéry cite rarement les auteurs des ouvrages au sein desquels sa pensée va se ressourcer.<br />

« Rien de plus novice quant aux idées, (et de moins nouveau), rien de plus hasardeux dans sa<br />

1<br />

Pas davantage dans ses Cahiers, contrairement à ce qui a pu être dit.<br />

2<br />

Cette lettre de Valéry à Fontainas est remarquable dans la façon qu’elle a de mélanger légèreté et<br />

sérieux, comme s’il s’agissait de brouiller les frontières entre les genres, mais surtout d’annuler le<br />

système de valeurs qui différencie entre elles les différentes activités ; Valéry, montrant par ces<br />

notations elliptiques, que tous les gestes sont égaux, fait œuvre de ‘Pataphysicien : « je me cuite<br />

quasi tous les soirs ; je fais tourner des toupies ; je donne des lois passagères à la pensée ; [...] je<br />

broie du noir, du bleu et du rouge [...] » (Paul Valéry, André Fontainas, Correspondance 1893-1945,<br />

Éditions du Félin, 2002, p. 143-144).<br />

3<br />

BESNIER, p. 388-391.<br />

4<br />

OC II, p. 1454.<br />

5<br />

Paul Valéry, Œuvres, I, édition établie et annotée par Jean Hytier, introduction biographique par<br />

Agathe Rouart-Valéry, Gallimard, collection Bibliothèque de la Pléiade, 1957, p. 316.<br />

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