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Ainsi, s’il n’est pas possible de parler de refus catégorique de la part de Jarry de la théorie de<br />

l’évolution étant donné les liens qu’il tisse avec le concept de l’ontogénie, ce refus semble<br />

néanmoins, dans le même temps, évident, dans la façon qu’a celui-ci de s’exprimer semble-t-il à<br />

travers le mépris constant et assourdissant de l’auteur de La Chandelle verte face à la réalité<br />

pourtant si déclamée du progrès dont l’évolution dans son cours inéluctable est prétendument à<br />

l’origine : c’est même le signe qui permet de la reconnaître autrement que comme une théorie<br />

mais de l’accueillir en tant qu’efflorescence infinie de bienfaits pour l’humanité se vérifiant au<br />

quotidien, comme s’y attèle la communauté scientifique au travers des publications nombreuses<br />

et les entreprises de vulgarisation, perpétuées par le biais notamment des journalistes, qui se font<br />

jour jusqu’en première page des grands quotidiens.<br />

À l’opposé de ce discours dominant au sein de la communauté scientifique avide de grandir<br />

l’humanité au travers de la perpétuation de l’hygiénisme, et de lui permettre d’enrayer le fléau de<br />

la dénatalité auquel elle est confrontée, Jarry va jusqu’à affirmer que le présent et le passé sont<br />

similaires comme il le suggère dans son compte rendu de « Le Dernier Rêve, de M. Maurice<br />

Magre », de « La Rabouilleuse, de M. Emile Fabre » et de « Le Cochon, de MM. Raoul Ralph et Emile<br />

Codey » : « […] est-on bien sûr que [l]e présent diffère du passé ? 1 »<br />

Ce qui est de l’ordre des avancées scientifiques les plus intensément louées renvoie<br />

inéluctablement à ce qui est situé le plus loin dans le temps ; cette idée que Jarry énoncera avec<br />

une constance remarquable tout au long de son œuvre est exprimée dès mai-juin 1894, dans ses<br />

« Visions actuelles et futures » parues dans L’Art littéraire, les trains pouvant ainsi être comparés<br />

aux dinosaures : « les trains que l’on a domestiqués comme les bœufs (déjà) et les rhinocéros,<br />

alors qu’il eût été plus beau de les ruer l’un sur l’autre en liberté dans une arène, comme<br />

l’Ichthyosaure et le Mégalosaure. 2 »<br />

Dans sa chronique « Le métal conjugal » parue dans La Plume du 15 janvier 1904, Jarry écrit,<br />

épousant la même dynamique de pensée : « Jéhovah armait déjà ses anges d’ « épées de feu » en<br />

radium : solidité, durée. »<br />

Déjà, Nerval, dont Jarry a pu s’inspirer, remarquait au sujet de Faust : « […] va-t-il vers les<br />

figures du passé ou vers celles de l’avenir ? Elles coexistent toutes [...] 3 ».<br />

Il s’agit par conséquent d’être « réfractaire à l’idée de progrès 1 » comme l’écrit Jarry dans<br />

Faustroll, « roman néo-scientifique », y compris, bien entendu, à l’idée de progrès littéraire (les<br />

1 Id., p. 677.<br />

2 OC I, p. 338-339.<br />

3 Gérard de Nerval, « Faust » de Goethe suivi du second « Faust », Œuvres complètes I, édition publiée<br />

sous la direction de Jean Guillaume et de Claude Pichois, Gallimard, collection Bibliothèque de la<br />

Pléiade, p. 507.<br />

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