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déchaînaient à travers tout une salle en rut l’ouragan des désirs et l’orgiaque folie des caresses. 1 »<br />

« Mais tout cela, on a le droit de le rêver seulement, et rien n’autorise à l’affirmer, et aucun<br />

commentaire ne peut le faire jaillir du texte, pourtant si clair, si vigoureusement exprimé, si<br />

décisif, qui nous apprend que cette gracieuse a existé, qu’elle fut mime, qu’elle parut deux fois en<br />

public […] 2 ».<br />

L’on voit ici, au travers de la mise en relief de ces morceaux choisis, combien une simple<br />

allusion de Jarry peut contenir (plus encore qu’induire), de par sa méthodologie critique qui<br />

développe le resserrement à l’extrême, une véritable étude comparée des deux textes, comprise<br />

dans la formulation cryptique de Jarry qui a ainsi tout d’un raccourci éclairant, paradoxalement<br />

éclairant, puisque celui-ci s’avère de prime abord obscur – mais il ne l’était sans doute pas pour<br />

Rachilde ; et il est vrai que Jarry, parlant d’initié à initiée, n’avait pas souci d’être clair, souci qu’il<br />

avait du reste peu de toutes les manières.<br />

Si Jarry évoque Vies imaginaires à plusieurs reprises, c’est sans doute du fait de la grande<br />

influence qu’a eue cet ouvrage sur lui, que l’on perçoit surtout à la lecture de la préface de cet<br />

opuscule de Schwob : « L’art est à l’opposé des idées générales, ne décrit que l’individuel, ne<br />

désire que l’unique. Il ne classe pas ; il déclasse. […] [R]egardez une feuille d’arbre, avec ses<br />

nervures capricieuses, ses teintes variées par l’ombre et le soleil, le gonflement qu’y a soulevé la<br />

chute d’une goutte de pluie, la piqûre qu’y a laissée un insecte, la trace argentée du petit escargot,<br />

la première dorure mortelle qu’y marque l’automne ; cherchez une feuille exactement semblable<br />

dans toutes les grandes forêts de la terre : je vous mets au défi. 3 »<br />

L’on peut difficilement ne pas y voir l’une des explications de la définition que donne Jarry<br />

de la ’Pataphysique dans Faustroll : « […] la pataphysique sera surtout la science du particulier,<br />

quoiqu’on dise qu’il n’y a de science que du général 4 ».<br />

La rédaction de Faustroll est, on l’imagine, tout imprégnée du souvenir de la découverte de<br />

l’ouvrage de Schwob, puisque Jarry publiera des passages de Faustroll dans Le Mercure de France en<br />

mai 1898 puis dans La Plume le 15 novembre 1900, après avoir, notamment, envoyé son<br />

manuscrit à Thadée Natanson qui en accuse réception le 17 janvier 1899.<br />

Néanmoins, un propos de Schwob, allant dans le sens de la préface de Vies imaginaires, a pu<br />

alerter précédemment Jarry, puisqu’il est cité dans le numéro de mars 1893 du Mercure de France :<br />

« [L]’art véritablement entendu semble au contraire se séparer de la science par son essence<br />

1 Id., p. 4-5.<br />

2 Id., p. 8.<br />

3 Marcel Schwob, op. cit., p. 509-510.<br />

4 OC I, p. 668.<br />

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