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3. 3. 7. 4. 4. 4. Réification de la femme aimante en œuvre.<br />

Aussi, pour qu’il ne devienne pas perte de temps pour le créateur, celui-ci doit s’attacher à<br />

faire de la femme aimante (lorsque celle-ci prend de facto une place dans sa vie) une continuité de<br />

son œuvre, ou l’intégralité de celle-ci, s’il n’a rien créé, s’étant, paradoxalement très exigeant (eu<br />

égard aux préceptes de l’idéalisme), satisfait de la pensée d’une œuvre, de la seule idée maîtresse :<br />

« Ton mari, tu le choisiras génial, sans œuvre ni production, afin qu’il fasse de toi sa statue et son<br />

poème 1 ».<br />

La réification de l’être aimante en œuvre n’est possible que si le penseur a une influence<br />

extrême sur elle. « [L]e Platonicien » doit « incant[er] la jeune fille 2 », il doit « entrer dans [son] cœur<br />

et l’emplir et ainsi l’orbiter à soi 3 ».<br />

Préalable indispensable à cette influence : son inexpérience. Elle doit être vierge, afin que<br />

l’emprise puisse être complète : « tout ce que la volupté a écrit sur votre chair et le romanesque<br />

sur votre esprit, tout cela est de la matière amoureuse gâchée qui vous fait incomplète sous mon<br />

cisaillement mental 4 ».<br />

L’inexpérience n’est pas, seule, indispensable. Il faut également que la jeune femme ne fasse<br />

preuve d’aucune rébellion, d’aucun sentiment personnel qui puisse être contraire à l’ambition du<br />

penseur. Elle doit être servile, « muett[e] », c’est-à-dire qu’elle doit n’opposer aucun argument à<br />

l’envahissement de son âme par les idées du penseur : « J’aime en les femmes […] leur servilité,<br />

mais je les veux muettes 5 », écrit Jarry dans Les Minutes.<br />

La femme n’est qu’écoute, et c’est à force d’ « écouter » le penseur qu’elle s’ « identifi[e] » et<br />

devient ainsi son « œuvre vivante 6 », se laissant « ensemenc[er] » par lui « en [son] âme 7 ».<br />

Et quand elle parle, c’est pour être un écho vivant des paroles du penseur. « [J]e voudrais<br />

[…] quelqu’un qui ne fût ni homme ni femme ni tout à fait monstre, esclave dévoué et qui pût<br />

parler sans rompre l’harmonie de mes pensées sublimes 8 », écrit ainsi Jarry dans « Haldernablou ».<br />

Comment en effet parler sans rompre l’harmonie des pensées sinon en faisant des paroles l’exact<br />

prolongement de celles-ci ? Nul avis nouveau, qui présente toujours le risque d’être contraire,<br />

1<br />

Péladan, La Décadence latine, éthopée [VI], La Victoire du mari, op. cit., p. 22.<br />

2<br />

Péladan, La Décadence latine, éthopée [IV], À cœur perdu, op. cit., p. 105.<br />

3<br />

Péladan, La Décadence latine, éthopée [V], Istar, op. cit., p. 104.<br />

4<br />

Péladan, La Décadence latine, éthopée [VII], Cœur en peine, op. cit., p. 211.<br />

5<br />

Bouquin, p. 49.<br />

6<br />

Péladan, La Décadence latine, éthopée [IV], À cœur perdu, op. cit., p. 257.<br />

7<br />

Péladan, La Décadence latine, éthopée [III], L’Initiation sentimentale, op. cit., p. 306.<br />

8 Bouquin, p. 49.<br />

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